Contre une chronique au jour au jour qui s’émeut d’autant moins de la répétition qu’elle procède par l’amnésie perpétuelle, il faut rappeler que les mouvements de « sans-papiers », découverts par le grand public à la faveur de l’actualité récente, ont une histoire, qui s’est traduite depuis le début des années 1970 par la forme de grèves de la faim collectives.
C’est, en décembre 1972, dans une église de Valence, la grève de la faim d’un aumônier de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC) et de 19 Tunisiens menacés d’expulsion suite aux premières applications des circulaires Marcellin et Fontanet, lesquelles précarisent les travailleurs étrangers non déclarés qui ne pourront plus prétendre à l’obtention d’une carte de séjour. Le soir de Noël, les prêtres de quatre églises de la ville inaugurent une forme de protestation inédite : la « grève de la messe. » Jusqu’en mai 1973, dans une vingtaine de villes françaises, des grèves de la faim collectives organisées entre autres par le Mouvement des Travailleurs Arabes ont lieu pour l’obtention de la carte de travail et contre les circulaires Marcellin-Fontanet. Suite à ce mouvement et aux difficultés d’application des circulaires, environ 50 000 immigrés sont régularisés de juin à octobre 1973.
C’est encore en février 1980, la grève de la faim de 17 Turcs en situation irrégulière employés dans la confection du Sentier, d’abord à la Maison verte, un centre protestant, puis à la salle Saint-Bruno à Barbès. Ils réclament leur régularisation, des salaires légaux et de meilleures conditions de travail. L’UD-CFDT de Paris assure l’encadrement de ce mouvement, de nombreux Turcs ayant pris leur carte à la fédération CFDT-Hacuitex (Habillement, Cuir et Textile). Du fait, notamment, de la diffusion avant la grève de la faim d’un reportage télévisé sur la confection clandestine dans le Sentier, cette action, relayée par plusieurs meetings et par de nombreuses manifestations, obtient un large écho et aboutit à un peu plus de 3 000 régularisations. La crainte de nouvelles grèves de ce type, d’une solidarité accrue entre des irréguliers en grand nombre et les associations de soutien aux immigrés, est une des raisons de la grande régularisation des sans-papiers initiée par le gouvernement Mauroy en 1981-1983, et au cours de laquelle 130 000 personnes sont régularisées. Ceci n’empêche pas toutefois une succession de grèves de la faim tout au long de l’opération, au nom d’un élargissement des critères de régularisation à des catégories non initialement prévues dans le cadre de l’opération, comme celle des travailleurs saisonniers ou les marchands ambulants.
C’est en 1991-1992, la répétition des grèves de demandeurs d’asile déboutés (1500 grévistes en tout), soutenus jusqu’à la mi-91 par des associations regroupées au sein du Réseau d’information et de solidarité, afin d’obtenir, sinon le statut de réfugié politique, au moins une régularisation de leur séjour. Une majorité des grévistes obtient satisfaction, et, suite à une importante mobilisation due aux grèves de la faim, la circulaire du 23 juillet 1991 permet environ 17 000 régularisations, sur une population de déboutés évaluée entre 50 000 et 100 000 selon la provenance, administrative ou associative, des estimations. Les grèves postérieures à cette circulaire se concluent par des négociations au cas par cas auprès des préfectures.
La litanie ne s’arrête pas là, comme on l’a vu avec Saint-Bernard en 1996 et plus récemment au Havre et à Limeil-Brévannes, Bordeaux et Orléans. Bref, vingt-cinq ans écoulés entre ces événements, et pourtant, un air de déjà vu pour tous les militants associatifs engagés de longue date dans le soutien aux sans-papiers, demandeurs d’asile déboutés, expulsables et autres étrangers en situation irrégulière. Même prédominance de la grève de la faim, même crainte, l’expulsion, même revendication, la régularisation des sans-papiers, même type de négociations avec les pouvoirs publics, se concluant par les mêmes régularisations « à titre humanitaire » dans le cadre d’une circulaire.
On voudrait revenir ici sur deux points particulièrement frappants dans les mouvements de sans-papiers : la façon dont le recours à la grève de la faim apparaît comme un moyen contraint et ce faisant particulièrement révélateur des obstacles qui s’opposent à la cause des sans-papiers, et la façon dont ce moyen même est porteur de contraintes propres au cours des mobilisations.
Les grèves de la faim faute de mieux
Pourquoi la grève de la faim ? Et sous la forme très particulière qui caractérise les mouvements de sans-papiers – on pense notamment au caractère collectif de ces grèves, à leur déroulement presque systématique dans des églises, à leur longueur ? Toutes ces caractéristiques montrent en fait à quels types de contraintes font face les mouvements de sans-papiers.
Contraints, ces mouvements le sont évidemment par la situation d’irrégularité qui caractérise les sans-papiers, et qui diminue d’autant le degré de tolérance des autorités étatiques à l’égard de protestations. Par beaucoup d’aspects, le recours à la grève de la faim est un recours faute de mieux. Faute d’arriver à organiser des manifestations de sans-papiers sans trop grand danger d’arrestation (cf. les arrestations place Saint-Michel au moins de novembre 1998), faute finalement que les pouvoirs publics acceptent de la part des sans-papiers ce qu’ils tolèrent d’autres catégories protestataires (paysans, routiers…), la grève de la faim apparaît comme un moyen « profil bas », qui permet de protester tout en tentant de se présenter comme inoffensif.
Contraint, le recours à la grève de la faim l’est aussi en ce qu’il succède souvent à des tentatives de mobilisation considérées comme plus classiques et/ou plus offensives, telles que la grève (les appels à la grève dans les secteurs demain d’oeuvre clandestine sont rarement suivis), la manifestation (la plupart des manifestations de sans-papiers se produisent plutôt après les grèves de la faim quand la mobilisation s’est déjà faite et que les sans-papiers sont sortis de l’ombre, plutôt qu’avant), les pétitions, autant de moyens qui lassent assez vite les sans-papiers, persuadés que ces moyens ne « servent à rien » et qu’il faut, ce faisant, passer aux grèves de la faim. La grève de la faim apparaît souvent comme le dernier recours, même si’l existe ensuite des recours encore plus ultimes, de l’ordre de la menace d’immolation, du passage à la grève de la soif, etc. Ce faisant, il est compréhensible que le passage à des actions davantage marquées par l’illégalisme (occupations de locaux, etc.) se produisent après les grèves de la faim, c’est-à-dire à un moment où les sans-papiers sont déjà apparus à visage découvert et ont ce faisant moins à perdre.
La grève de la faim, par d’autres aspects, répond aussi aux difficultés auxquelles font face les sans papiers du fait de leur situation de relative clandestinité. Pourquoi avoir si souvent recours aux grèves de la faim dans les églises ? Cette pratique ne s’explique pas seulement par le fait que l’Église catholique constitue classiquement un soutien aux mouvements immigrés, pas plus qu’elle ne saurait renvoyer uniquement à la connotation d’indignation morale qui entoure les mobilisations de sans-papiers. Si les militants sans-papiers ou ceux des comités de soutien connaissent souvent les églises « de gauche » susceptibles de les accueillir, ces soutiens supposés que sont les institutions religieuses font parfois preuve de peu d’enthousiasme pour fournir des lieux de grève de la faim. Aussi est-il courant que les grévistes s’imposent dans une église et mettent les autorités ecclésiastiques devant le fait accompli, avec succès la plupart du temps.
Mais compte-tenu de la précarité des étrangers en situation irrégulière, susceptibles à tout moment d’être arrêtés, la pratique de la grève de la faim dans les églises permet une protestation sans trop grand danger d’arrestation, dé-territorialisant en quelque sorte un mouvement public de clandestins. De façon générale, les autorités préfectorales ne souhaitent pas avoir à traiter des revendications de militants associatifs concernant des arrestations d’irréguliers effectuées dans le périmètre de la grève et alors même que se déroulent des négociations. Les lieux de régularisation et les lieux de grève constituent ainsi des points d’ancrage de la mobilisation, qui réduisent l’incertitude dans laquelle sont plongés les sans-papiers. Devenus visibles par le biais des grèves de la faim, des irréguliers peuvent ainsi rallier d’autres irréguliers. Les grèves de la faim peuvent constituer de véritables « zones franches » au sein de la ville, des lieux de relative impunité à l’égard des services de police, des lieux de ralliement pour des irréguliers qui, même s’ils ne font pas la grève de la faim, se rendent sur place, soutiennent les grévistes, les encouragent, et leur rappellent, s’ils étaient tentés de l’oublier, que leur régularisation dépend aussi de cette grève. Ces lieux leur permettent d’échanger des informations voire, pour certains, de dormir sur place quand ils se trouvent momentanément à la rue. Très souvent (grève de la faim des Pakistanais rue Dulong en 1974, grève des déboutés), les lieux de grève sont des lieux d’hébergement avant et après la grève de la faim, permettant parfois de rester rassemblés en attendant de trouver un logement ou jusqu’à la régularisation effective des grévistes. Cet aspect de lieu de ralliement se retrouve jusque dans la façon dont les lieux de grève sont en général entourés de banderoles, parfois bilingues ou trilingues, qui les signalent à tout le voisinage – et même, par conséquent, à des visiteurs ne maîtrisant ni la langue française ni la topographie. Cette quasi extra-territorialité des lieux de grève, renforcée par la notion d’asile généralement associée aux lieux de culte, ne doit pas pourtant être surestimée, comme le prouve l’intervention dans l’église Saint-Bernard en août 1996 ou les interventions, plus récentes, pour raisons médicales (Limeil Brévannes, Bordeaux…) ou de salubrité (Orléans). Cette sécurité est avant tout négociée : cet aspect quelque peu inviolable des lieux de grève se vérifie surtout dans les « pics » de mobilisation. A l’inverse, dans les fins de mouvements, la police intervient souvent.
Les grèves de la faim mettent aussi en lumière les soutiens dont sont susceptibles de bénéficier des mouvements de ce type, et les registres protesttaires impliqués par les sensibilités de ces mêmes soutiens. Il est clair que le même moyen (la grève de la faim) peut avoir des significations très différentes selon ceux qui y ont recours, puisqu’il peut aussi bien être approprié sur le registre de la non violence chez des chrétiens de gauche qui se reconnaîtraient dans cette version du mode d’action, alors que le même moyen peut renvoyer à un passé de violences, souvent subies, parfois commises, par les grévistes eux même. Faire souffrir son corps en imputant cette violence au « pouvoir d’en face », c’est retourner contre ce dernier ce qu’il a pratiqué ou est susceptible de pratiquer légitimement contre soi – emprisonnement, expulsion, coups. Une explication du recours fréquent à la grève de la faim par les sans-papiers peut alors être avancée à partir des parcours de ces irréguliers : ce qui caractérise les grévistes dans le rapport politique qu’ils sont susceptibles d’entretenir à leur corps, c’est précisément le rapport de domination et de violence que ces corps ont subi, cette incorporation de la domination qu’a constitué un marquage symbolique, mais aussi physique, des corps. Il est ainsi frappant, dans le cas des grèves que nous avons pu observer tout particulièrement, que les groupes qui y ont recours sont dans les deux cas passés par des expériences telles que la prison, de mauvais traitements, ou la torture. Il ne s’agit pas seulement de savoir-faire accumulés : ces expériences sont des clefs susceptibles d’éclairer le recours à la grève de la faim et d’expliquer comment certains stigmates ont été retournés dans l’action.
Les contraintes du recours aux grèves de la faim
Mais la grève de la faim est aussi porteuse d’un certain nombre de contraintes. Il s’agit tout d’abord de contraintes de registres, dues d’une part aux thèmes sur lesquels les soutiens sont mobilisables (on pense notament à l’égise catholique et aux chrétiens de gauche, public largement sensible à la thématique humanitaire, et au recours à un moyen aussi saturé de significations que la grève de la faim), et d’autre part à la dépendance de nombreuses associations à l’égard des financements publics. La question du financement a toujours lourdement pesé sur les registres de défense des sans-papiers : les positions humanitaires et euphémisées des associations s’expliquent en partie par les contraintes qui pèsent sur le monde des associations liées à l’immigration, notamment leur fréquente dépendance à l’égard des financements publics et des relations qu’elles sont susceptibles d’entretenir avec certains membres de cabinets ministériels côtoyés dans un passé militant commun. Dans quelques cas précis, il est clair que ces liens les cantonnent à un rôle d’agences de gestion de l’immigration et ne leur permettent pas de soutenir longtemps des thèmes aussi illégitimes que ceux de la régularisation des sans papiers, l’humanitaire constituant en quelque sorte un registre de repli. Enfin, le recours à la grève de la faim, compte tenu de la focalisation qu’il implique sur les souffrances des grévistes (maigreur photographiable, hospitalisations dénombrées, etc.), ne peut qu’accentuer cette dimension de traitement humanitaire.
L’autre contrainte du recours à la grève de la faim, c’est justement l’épuisement rapide des soutiens qu’il provoque. Soutenir un mouvement qui procède par grève de la faim, c’est très vite être absorbé par l’intense activité qu’il faut déplier autour de grévistes allongés et qui mettent leur santé voire leur vie en danger. Cela a pour princiaple conséquence un effondrement rapide du collectif. La mécanique même de la grève aboutit à faire disparaître toute prétention à représenter qui que ce soit d’autre que les grévistes. Par là-même, elles détruisent tout le travail qui consistait à faire des grévistes les représentants des sans-papiers en général (travail qui passe par exemple par le choix de ne pas laisser faire la grève de la faim à tous les sans-papiers qui le demandent, mais à un nombre limité d’irréguliers, en soutenant qu’ils représentent tous les clandestins).
Cela a enfin pour conqésuence tout un ensemble de contraintes stratégiques particulièrement aigües lors des négociations. La position des militants des comités de soutien devient en effet intenable quand les grévistes encourent des séquelles graves. Aussi, le discours des militants associatifs à l’égard de la presse (« nous sommes bien obligés de suivre »), n’est pas seulement dû au fait que la grève de la faim permet aux sans-papiers de mobiliser leurs soutiens. C’est aussi une façon d’éviter que les pouvoirs publics ne rejettent toute la responsabilité des grèves de la faim sur ceux qui les soutiennent. Une grande partie du comportement des militants lors des grèves peut être expliquée par la double contrainte qui consiste à faire pression sur les pouvoirs publics tout en s’assurant que les grévistes ne sont pas rentrés dans une période de risques graves. Aussi les responsables associatifs sont-ils partagés entre l’utilisation de la menace de séquelles irréversibles, et la crainte d’être responsables de morts ou de comas. Pour les négociateurs, il s’agit autant que possible de faire monter les « enchères » et de ne pas accepter les premières propositions des pouvoirs publics : grévistes comme militants des comités de soutien savent que seule la grève de la faim est à même d’instaurer un rapport de force quelque peu favorable. L’arrêt de la grève signifierait à l’inverse la perte de tout avantage stratégique, et ce d’autant plus qu’il serait alors difficile de relancer immédiatement des grèves. Aussi, le recours à la grève de la faim, en même temps qu’il permet le passage à la mobilisation, par le type de relations qu’il suppose entre comités de soutien et grévistes, pèse lourdement sur les négociations. Les comités de soutien aux grévistes osent rarement prendre des positions maximalistes à un stade de la grève où ils risquent des morts. Si, dans les premiers contacts avec l’administration, il est souvent possible de faire participer aux délégations des représentants des grévistes de la faim (et encore faut-il en trouver qui parlent le Français), une telle pratique devient improbable lors des plus importantes de ces négociations, c’est-à-dire celles qui se situent en fin de grève. Il est presque impossible de faire participer des grévistes malades et épuisés à des réunions. Le contrôle de la grève, et au-delà, des négociations, par les grévistes, s’en ressent dès lors fortement.
Ces difficultés sont d’autant plus considérables que les grèves durent longtemps, ce qui est le cas depuis le début des années 90. Il n’est pas improbable à l’inverse que les revendications bien plus maximalistes des grévistes des années 70 étaient dues au fait que les grèves de la faim duraient alors moins longtemps (n’inquiétant pas autant de ce fait les représentants des grévistes), et pas uniquement au radicalisme politique caractéristique de la période. Enfin, on ne voudrait pas ici signifier que les autres modes d’action permettent une « transparence » de la représentation et de la délégation que la grève de la faim empêcherait par définition. Mais s’il est vrai que toute délégation est susceptible de s’accompagner d’une relative dépossession, c’est ici le fait de représenter des personnes en danger de mort ou de séquelles graves qui différencie les négociations lors des grèves de la faim des autres modes d’action.
Cette position particulièrement inconfortable des représentants des grévistes est susceptible d’expliquer que les résultats des grèves de la faim sont souvent perçus comme des échecs relatifs. D’une part, l’inquiétude à l’égard de la vie des grévistes contraint à accepter des propositions des pouvoirs publics bien inférieures à celles qui étaient recherchées. D’autre part, le danger de mort fait exploser la prétention au collectif des grèves de la faim, qui ne concernent plus en définitive que les grévistes, et non tous les sans-papiers dont ils se font les porte-parole. Si ce sont le plus souvent la profusion des grèves, leur caractère particulièrement décentralisé et incontrôlable qui motivent leur prise en compte par les pouvoirs publics, ces caractéristiques aboutissent aussi à paniquer les représentants des grévistes lors des négociations. Ces derniers essaient de s’en tenir le plus longtemps possible à leurs revendications de départ, mais la crainte que ne surviennent des morts aboutit en définitive à saper très rapidement cette position face aux représentants de l’administration. Il n’est pas improbable que les membres des comités de soutien les plus inquiets quant à la santé des grévistes sont aussi les plus prompts à se persuader que leurs revendications étaient acceptées. Or c’est sur le compte-rendu de ces mêmes délégués que sont souvent décidées la fin des grèves. Comment ne pas penser que les délégués présentent aux grévistes ce qu’ils espérent être une réalité tant ils tiennent eux-mêmes à la fin des grèves ? Et à l’inverse, comment s’étonner des difficultés de négociation dès lors que les grèves de la faim sont terminées et que les représentants des sans-papiers s’estiment dépositaires de la souffrance des grévistes ?
Moyen « contraint » du fait des possibilités limitées qui s’offrent aux sans-papiers, la grève de la faim est donc un mode d’action lourd de contraintes stratégiques.
Il resterait enfin à s’interroger, mais cela dépasse sans doute le cadre de cet article, sur la place et les fonctions de la cause des sans-papiers dans le jeu politique, cette cause ne cessant d’être instrumentalisée de toutes parts, et n’arrivant finalement à « être posée en politique » que si elle peut être porteuse de profits pour les diverses entreprises politiques en compétition. La cause des sans-papiers a ainsi été l’objet au cours de ces vingt-cinq dernières années d’investissements particulièrement fluctuants de la part de la gauche française. L’audience dont a bénéficié le mouvement de Saint-Bernard, la prise en charge aujourd’hui de ce thème par les Verts, ne doit pas faire oublier que jusqu’alors seules la marginalité et le caractère parfois considéré comme avant-gardiste de la cause des sans-papiers ont été à même de motiver l’engagement de certains soutiens. Si la population mouvante des sans-papiers a pu constituer un enjeu crucial pour certains militants et organisations militantes, c’est notamment parce que ces derniers étaient les plus « hérétiques » au sein de leurs espaces politiques et associatifs respectifs.