Mutitude/Multitudes

Multitude : le nom d’un pluriel

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Charles :

A vrai dire pendant longtemps je ne me souciais pas de cette question qui
me semblait byzantine ou bonne pour les Pères de l’Eglise.

Mais petit à petit on y vient.

Je crois comprendre que

1) Multitude n’a pas besoin de pluriel, ni chez Bento Spinoza ni chez Toni
Negri, pour designer une masse, une foule, une multiplicité.

2) Multitudes (le terme, pas la revue qui est faite d’individus
extrêmement épars qui n’ont pas une consigne de vote uniforme, ni des
opinions philosophiques uniformes, ni, ni …) semblerait designer une
“réalité empirique” ou, pour le dire plus ironiquement, un “désir de
réalité empirique” au sens ou la Pensée ne veut pas s’auto-fonder ni se
contempler dans un miroir ; elle veut, comme dit le tout dernier
Althusser, prendre le train en marche et dans ce sens être “branchée”
(cf. Deleuze-Guattari, début des années 70) sur un flux fait des
“mouvements” (au sens donne a ce terme depuis 1995 approximativement).

Or,

3) comme le signalait si bien Le Monde dans son glossaire de l’
“altermondialisation” (je trouve ce mot vraiment nul, en passant, digne du
“baladeur”), la notion de “multitudes” crée des remous dans une certaine
tranche de la population parce qu’elle exprime le fait que les notions de
“peuple” ou de “travailleur” ont été remplacées par celle-ci (multitudes),
qui intègre une nouvelle théorie de la valeur (non, je ne peux pas
développer ce point, ce n’est pas mon domaine) ou “l’intellect” a le droit
de jouer un rôle ; de la le “General Intellect”.

Mais les tenants du (1) reprochent au (2), je crois, d’avoir mal assimile
la leçon résumée en (3) : de cacher derrière ce pluriel qui revendique son
rapport aux “Mouvements”, un Peuple/Travailleur déguisé ou masqué. Le
singulier serait en ce sens plus “radical”, plus “pousse” dans la
transformation, que le pluriel.

Pour l’instant, je ne vois pas de faille ou de réfutation à cette position
des tenants du (1). Ca ne signifie pas que, comme Amos Oz qui refuse
d’employer le terme de Shoah et n’accepte que celui d’Holocauste, je ne
veux plus utiliser que le singulier. Mais, au moins dans les termes
ci-dessus (qui expriment les limites actuelles de ma prise de conscience
de la chose), je crois que les “singuliers” ont raison, dans le cadre
prédéterminé de cette discussion.