Multitudes : Masha Zhina Amini, cette jeune femme de 22 ans, est morte à cause du port « inapproprié » de son voile. La mobilisation immédiate de la population kurde, à laquelle elle appartenait, a généré un mouvement insurrectionnel mené par les iraniennes, rejointes par les iraniens, qui s’est étendu à tout le pays. Comment expliquez-vous cette déflagration ?
Hawzhin Baghali : Il faut rappeler le contexte du soulèvement en Kurdistan. Au début de la Révolution islamique de 1979, au Kurdistan, les partis politiques étaient contre l’installation de la République islamique en Iran. Cette opposition à la République islamique est restée une tradition permanente au sein des Kurdes. Il ne s’agit pas seulement des partis politiques mais aussi d’autres organisations présentes comme les écologistes, les syndicats des enseignants et des travailleurs, des activistes féministes très dynamiques. Depuis sept ans, sur Telegram, nous avons formé un groupe de féministes kurdes et travaillons ensemble, femmes d’Iran et de la diaspora. Le 1er mai de chaque année, les premiers ouvriers arrêtés sont kurdes. De même, les premiers enseignants à faire grève vivent dans les régions kurdes, surtout à Saqqez, la ville natale de Mahsa Zhina (Zhina est son prénom kurde). Les Kurdes sont capables de se mobiliser très rapidement. Lorsque le cadavre de Mahsa Zhina est arrivé à Saqqez, la famille de Mahsa Zhina a refusé de l’enterrer comme l’avait prévu le gouvernement. Les habitants des villes voisines sont allés à Saqqez pour empêcher l’enterrement immédiat de Mahsa Zhina et préparer une grande cérémonie le lendemain. Et les gens ont réussi à l’imposer bien que la ville ait été encerclée par les Gardiens de la révolution islamique. Toute la nuit des activistes, enseignants, écologistes, travailleurs, travailleuses et d’autres groupes culturels, se sont mobilisés et ont préparé des discours pour l’enterrement. À Saqqez le slogan « femme, vie, liberté » a été scandé lors des funérailles de Mahsa Zhina Amini. L’entendre n’a pas été pour nous une surprise, ce slogan avait déjà été scandé dans la rue en 2013 ou 2014.
Chowra Makaremi : Peux-tu dire d’où il vient exactement ?
H. B. : On ne peut pas dire précisément qui a popularisé ce slogan ou qui l’a proféré la première fois. Mais Öcalan a écrit en 2005 dans le 4e volet de ses cahiers de prison qu’il n’y pas de libération du peuple sans libération des femmes. Ce slogan n’est pas né d’un coup, il fait suite à la lutte des femmes du Kurdistan de Turquie très actives depuis 2000. Donc Öcalan s’est inspiré lui-même de ce qui se passait dans le mouvement des femmes. En 2013, quand Sakine Cansiz Narjes (Sara) Fidan Dogân (Rojbîn), Leyla Saylemez (Ronahî) ont été assassinées ici à Paris, on a entendu ce slogan dans les rues de Paris, ainsi qu’à Koban, à Rojava, mais aussi au Kurdistan d’Iran à partir de 2014-2015. Je pense que les Iraniens l’ont entendu scander pour la première fois à Sanandadj et il a retenti ensuite à l’université de Téhéran.
C. M. : Et les femmes ont enlevé leur voile pour la première fois ensemble lors de ces funérailles.
Rezvan Zandieh : Je veux revenir un peu en arrière et sur d’autres formes de résistance féministes iraniennes. L’un des événements marquants et progressistes des luttes de femmes remonte à 2018 : les « Filles de la rue Révolution ». Il s’est agi d’une résistance individuelle qui est devenue très vite politique. Ce mouvement a commencé avec le geste de Vida Movahed qui est montée sur une boîte de distribution électrique et a brandi son voile au bout d’un bâton. Ce geste a été repris d’abord par beaucoup d’autres filles mais aussi par des hommes, et aussi des femmes voilées. On a vu quelque mois après se déclencher les émeutes de 2019, inédites par rapport à leur ampleur ; toutes les villes d’Iran étaient touchées. Bien évidemment, la protestation contre la vie chère et l’augmentation du prix de l’essence étaient en arrière-plan. Le mouvement a été violemment réprimé par le régime qui a fait au moins 1 500 victimes.
Depuis 2019, d’autres mouvements féministes se sont formés, notamment « les mères d’Aban » – qui est à son tour une reprise des « mères de Khavaran », lequel remonte aux années 19901. Il faut rajouter à cela la colère des familles du vol de l’Ukraine Airlines qui ont perdu leurs proches à cause du tir de missile des Gardiens de la révolution islamique – en représailles à la mort de Ghassem Soleymani. Il ne faut pas omettre les formes de résistance individuelle comme les « mercredis blancs » où les filles enlevaient leur voile (blanc) dans les recoins de l’espace public et diffusaient leurs photos sur internet. Ce mouvement a été baptisé « les libertés fugitives » à l’initiative de Masih Alinejad. On peut multiplier les exemples de rébellion et remonter au 8 mars 1979, date de la première manifestation des femmes organisée contre la République islamique et plus particulièrement, contre le port obligatoire du voile.
C. M. : J’ajouterai une autre image à ce tableau : celle de Sepideh Gholyan avec ses cheveux bleus et son voile en arrière, applaudie et reconnue comme leader par les jeunes hommes manifestants lors des émeutes de 2019. Le mouvement en 2019 est parti exactement de la même façon que le mouvement des Gilets jaunes : une protestation contre la vie chère et un sentiment d’étouffement. Ces émeutes ont été férocement réprimées (plus de 1 500 morts en quelques jours). La classe moyenne n’a pas été très solidaire de ces révoltes des jeunes des classes populaires dont on ne savait pas ce qu’ils voulaient. Mais si on regarde ce mouvement à la lumière de ce qui se passe aujourd’hui, on voit que la demande de changement de pouvoir était en germe. Non seulement la crise de 2019 n’a pas été réglée, mais elle a été « congelée » par la crise du Covid qui a encore empiré les choses. Donc, il y a une généalogie des luttes qui permet de voir comment les choses se sont ajointées pour en arriver là aujourd’hui.
Sepideh Ghloyan est une activiste, fille d’un syndicaliste ouvrier et féministe, qui a été arrêtée à plusieurs reprises. Les mouvements sociaux des classes populaires et le mouvement féministe se sont aujourd’hui rejoints. Ces luttes populaires seraient la troisième genèse du mouvement contestataire. Les activistes du mouvement ouvrier, les syndicalistes (enseignants et chauffeurs des transports publics), ça fait vingt ans qu’ils ont l’expérience des aller et retour en prison. Ils ont des caisses de grèves bien organisées, ainsi que des groupes Whatsapp et Telegram. Ils sont aussi en lien avec les syndicats à l’étranger. C’est un réseau très vivace qui a l’habitude de la répression. Cela pour répondre à la question récurrente aujourd’hui : comment un mouvement sans leader peut se former et avancer ? Mais en deçà de la question du leader, il faut voir quelle est la résistance organique. Ce mouvement syndicaliste dont est issue Sepideh Gholyan dure depuis des décennies, il a une culture de résistance.
R. Z. : Ce mouvement ouvrier a remporté une petite victoire en imposant ses revendications dans le cadre du mouvement ouvrier de Haft Tappeh – contre la privatisation de l’usine du sucre.
C. M. : Il est intéressant de noter que le secteur de l’industrie du sucre a été déstructuré par les décisions d’Ahmadi Nejad qui, en même temps qu’il prônait un socialisme de façade, a décimé l’économie iranienne à travers les réformes néolibérales, dont l’importation du sucre d’Asie. La résistance ouvrière est contre la politique néolibérale du régime mais aussi contre son côté patriarcal. II y a eu également une grève des enseignants qui a été très forte, très mobilisatrice. Je parle du mouvement syndical parce que la question de la grève va sans doute se poser. Elle se pose déjà et va continuer à se poser.
Il faut parler aussi de ce qui s’est passé au Baloutchistan, où une jeune fille a été violée par un agent de police. En réaction, la très forte contestation des Baloutches a été réprimée dans le sang vendredi 30 septembre à Zahedan : 91 personnes ont été assassinées par les forces de l’ordre qui ont tiré sur la foule à la sortie de la prière du vendredi. De nombreuses personnes sont mortes (on parle de « vendredi sanglant », comme on parlait du « vendredi noir » qui avait été un point de départ de la révolution en septembre 1978). Cela a moins été couvert par les médias.
Les descentes des miliciens basiji à l’université Sharif de Téhéran le 1er octobre a suscité beaucoup plus d’émoi que ce massacre au Baloutchistan. Là-bas, le régime exerce une politique contre-insurrectionnelle ou anti-terroriste. On voit là le visage militaire de la violence d’État, là où, à Téhéran, on voit le visage de l’État voyou, avec des agents en civil, des milices, des centres de détention secrets. Tout cela est parfaitement illégal. Il y a plusieurs visages de la répression qui s’articulent ensemble, et selon la situation ou le contexte, les luttes rencontrent l’un ou l’autre visage. Mais toutes les luttes sont liées car elles portent la même revendication qui est la demande du renversement du régime. C’est cela la nouveauté.
Multitudes : Les femmes enlèvent leur voile et découvrent leurs cheveux, elles dansent, chantent, rient, s’exhibent, toutes manifestations qui leur sont interdites. Peut-on parler de l’apparition des corps féminins dans l’espace public comme sources vives de la révolution ?
R. Z. : Je pense qu’il s’agit vraiment d’une dimension esthétique de la résistance dans tous ces trois tableaux que nous venons d’esquisser. Chowra a souligné l’apparence de Sepideh Gholyan. J’ai archivé ses photos et je la vois avec des cheveux bleus, du rouge à lèvres, du maquillage et des vêtements traditionnel colorés etc… La résistance de la société iranienne a lieu aussi dans le champ esthétique. Il faut entendre cette esthétique au sens de visibilité. Le geste des « Filles de la rue Révolution » s’est multiplié non seulement par les filles, mais ce geste est devenu une icône de la résistance des femmes.
Par ailleurs, il faut évoquer toutes les créations artistiques suite à ce mouvement de contestation. Les œuvres d’art se multiplient : des dessins, des chants, des vidéos, etc. Le geste de se couper les cheveux est très innovant. Se couper les cheveux ou brandir le voile au bout de bâtons est devenu une performance qui atteste le pouvoir révolutionnaire des femmes. Tout est théâtralisé ici. La dimension artistique est l’un des moyens de s’exprimer contre la répression systématique du corps féminin. Le régime veut invisibiliser les femmes par le port du voile obligatoire qui efface, exclut l’identité ou l’existence du corps féminin. Le donner à voir comme une stratégie de résistance va justement à l’encontre de cette exclusion. Cette exclusion va jusqu’à concerner la voix féminine car il est interdit aux femmes de chanter dans l’espace public ou devant les autres (sauf sous forme de chorale accompagnée par une chorale masculine). Dans la première vidéo de Masha Zhina Amini diffusée après sa mort, on la voit danser.
C. M. : Pour moi cette image de Masha Zhina, une femme kurde en train de danser, est l’essence de « femme, vie, liberté ». Il a fallu la culture kurde pour que l’on sorte du culte de la mort du chiisme et qu’on entre dans la vie comme dans la danse. Les Kurdes ont une danse pour toute occasion. Sans vouloir faire de culturalisme ici, il est évident que lorsqu’on voit Masha Zhina danser ou lorsqu’on entend de la musique kurde en manifestation, on remarque tout de suite quelque chose de différent, qui est de l’ordre de cette joie qui a été réprimée dans la culture chiite.
H. B. : Il y a une expression kurde qui dit « on n’arrête pas de danser ».
C. M. : Je suis en train de travailler sur les archives visuelles des peshmerga (combattants) du Komala (parti communiste kurde) et je vois qu’ils dansent en toute occasion : quand ils perdent une bataille, quand ils gagnent une bataille, quand un camarade est mort, quand quelqu’un est né.
R. Z. : La danse est liée aux combats et aux luttes des Kurdes. La forme de la danse aussi est intéressante parce qu’il ne s’agit pas d’une danse individuelle mais d’une danse collective. Ils se prennent par les mains ou les épaules les uns les autres. Ces gestes, ces danses ressemblent aux gestes des combattants et des militants. Ainsi, en dansant, ils forment un corps collectif.
Et à propos des couleurs chez les Kurdes, je pense que cet aspect artistique devient une forme de la résistance. Moi, personnellement, j’ai passé toute ma scolarité en Iran, et on était obligées de porter un uniforme et un foulard, soit bleu marine soit noir à l’école, et il était même interdit de porter des chaussettes blanches. Tous les vêtements de couleur étaient interdits. On était même humiliées à cause de nos vêtements.
Multitudes : La République islamique a montré qu’elle est capable de s’accommoder d’un hijab relâché pour rester au pouvoir. Penses-tu que cet aspect esthétique peut rester radical sans tomber dans le piège de la République islamique ? Tant que la révolte ne touche pas les fondements économiques et politiques, les réformateurs sont capables de sauver le régime en déployant un visage modéré de l’Islam politique.
C. M. : Je me demande si ce que tu pointes n’a pas été vrai jusqu’à l’élection de Raïssi. Car il y a une évolution de la République islamique. Raïssi, de façon marquante, est le seul président élu avec un si petit nombre de votants. Habituellement, le gouvernement s’arrange pour emmener les gens aux urnes. Il y a un pacte. Ils sont rusés.
Je me rappelle que je suis allée voter en 2017 pour le second mandat de Rohani parce que le candidat challenger était Raïssi, le bourreau des massacres de 1988, et que je ne voulais surtout pas qu’il passe. J’ai voté par loyauté à l’histoire de ma famille2. Mes ami·es se moquaient de moi et me disaient que j’étais trop bête, que je jouais leur jeu. Parce que, bien sûr, le Guide suprême avait été chercher Raïssi comme repoussoir pour que les gens votent pour Rohani. C’est ainsi depuis des années. C’est comme le capitalisme qui absorbe la contestation pour devenir plus fort. Avant Raïssi, les mollahs se sont toujours débrouillés pour obtenir une grande légitimité politique grâce au vote populaire, même s’il y avait une contestation souterraine grandissante. Avec Raïssi, c’est la première fois que ce phénomène ne joue plus. On a eu l’impression qu’ils n’en avaient plus besoin, et on ne sait pas pourquoi. Ils ont renoncé à jouer ce jeu compliqué d’attirer les gens aux urnes et d’ouvrir l’espace public pour que les gens débattent entre eux et aient l’illusion d’une liberté politique. Les gens croyaient qu’ils allaient voter pour le moins pire. Cette fois-ci – est-ce du fait de la grande puissance militaro-sécuritaire dans la région ? – ils ont pensé qu’il n’y avait peut-être pas besoin de l’assise populaire. Quel est le lien entre les événements présents et l’élection de Raïssi, qui était une « non-élection » ? Pour moi, c’est une leçon politique incroyable : ils pensaient ne plus avoir besoin de cette légitimité, et ils ont ce qui se passe aujourd’hui. Après la réélection de Rohani en 2017, il y a eu une rupture. On peut se poser la question de ce moment, qui signe le décrochage du réformisme. L’échec politique des réformistes a signé la fin de leur hégémonie idéologique en tant que force de contestation.
R. Z. : Quelle est la responsabilité du pouvoir lui-même dans cette rupture du statu quo, et cette répression recrudescente ? Raïssi a institué la Journée nationale du voile en Iran le 12 juillet, et le 30 juillet il y a eu les confessions forcées à la télé de cette jeune femme, Sepideh Rashno. Après une altercation dans le bus avec une femme basiji qui lui reproche d’être « improprement vêtue » et la filme, elle a été arrêtée. Elle a réapparu quelques jours après à la TV avec des traces de coup, contrainte d’avouer sa faute.
H. B. : Selon moi, le pouvoir ne voulait pas lâcher mais il a compris qu’après le soulèvement de 2017, obtenir la légitimité de nouveau était impossible. 2017, c’est l’année de la rupture entre le peuple et le régime que traduit clairement le slogan porté par les étudiants : « fondamentalistes réformistes, ce n’est pas notre histoire. ». Mais en fait, le pouvoir n’a pas vraiment lâché, car, depuis 2018, on a vu une répression accrue sur les femmes. La République islamique a regagné du pouvoir en rendant obligatoire le hijab, qui est un moyen de s’approprier le corps de femmes. Le hijab est devenu la première préoccupation du pouvoir, le sujet favori des médias et de la société. Le hijab est un pilier du régime islamique. Mais ça n’a pas permis au gouvernement de retrouver sa légitimité.
R. Z. : Il faut parler de « Gasht-é Esrhad », l’Institut de la police des mœurs. Le voile est l’élément idéologique de contrôle de la République islamique. Sans le voile, il ne peut pas exister. C’est à travers la capture du corps féminin que le pouvoir s’exerce. J’ai travaillé sur l’histoire de la police des mœurs. Le voile distingue la République islamique du pouvoir occidental impérialiste et colonial. Pendant la guerre Iran-Irak, le voile obligatoire prend une forme idéologique. Au cours de cette guerre, le pouvoir s’est renforcé et ce qui était obligatoire devient la norme unique. Il devient la ligne rouge qui distingue les antirévolutionnaires des prorévolutionnaires. On ne peut le supprimer car c’est par là que le contrôle des corps s’effectue. Après la Révolution, « le mal voilé » devient un concept qui met en avant une forme particulière de féminité valorisant le voile.
Nous avons grandi dans ce système de violence physique exercée par la police des mœurs, mais aussi par des institutions comme l’école et les médias qui enseignaient que la femme « normale » est celle qui est la plus voilée. Et plus les femmes prenaient de la distance avec ces normes, plus elles s’excluaient de l’espace public. Les femmes « mal voilées » ne pouvaient pas avoir de poste dans la fonction publique. Le « mal voilé » était toléré par le pouvoir quand il avait besoin de votes pour être légitimé, comme l’a dit Chowra.
H. B. : Avant l’avènement de la République islamique, le voile intégral n’existait pas comme symbole de l’Islam. Peut-être traditionnellement dans certaines villes du centre de l’Iran le voile intégral était porté, mais dans la plupart des régions, il n’existait pas. Quand j’étais petite, nous disions « tchador Khomeini ». Pour montrer comme le voile est devenu le symbole de l’Islam politique, je donnerai l’exemple de ces femmes islamiques du Kurdistan d’Irak que j’ai interviewées. Elles me racontaient que dans les années 80, elles voulaient porter le voile intégral mais ne savaient pas où l’acheter. L’une d’elle m’a dit que son père était allé à Bagdad pour se le procurer.
R. Z. : On ne peut pas dire pour autant que les questions économiques, les grèves des ouvriers, les soulèvements des étudiants ne soient pas importants. Bien sûr qu’ils comptent. C’est pourquoi le mouvement n’est pas un mouvement des femmes mais un mouvement féministe, qui est inclusif et intersectionnel.
Multitudes : On voit sur des vidéos des femmes voilées venir aux manifestations contre le voile. N’est-ce pas la preuve d’une victoire de femmes contre le hijab et les dictats du gouvernement ?
R. Z. : On voit dans des manifestations des femmes voilées qui brûlent le voile ; une autre image montre deux femmes, l’une sans voile, l’autre portant le voile, elles sont prises de dos se tenant la main. Tout est dit !
Multitudes : On apprend hier que les employés des usines de pétrochimie sont en grève et ont rejoint les manifestants, que l’armée conventionnelle marquerait ses distances vis-à-vis de la répression, que des vétérans proches du Guide suprême manifesteraient leur désaccord avec le tout sécuritaire et répression ; on apprend aujourd’hui que la prison d’Evin, où sont enfermés les prisonniers et prisonnières politiques, brûle ; demain…
Propos recueillis par Behrang Pourhossseini
& Gaëtane Lamarche-Vadel
1Voir Parvin Ardalan, « Femmes iraniennes en lutte. Le cauchemar du régime islamique », Multitudes, no 83, été 2021.
2Chowra Makaremi, Les cahiers d’Aziz, Paris, Gallimard, 2011
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