82. Multitudes 82. Printemps 2021
Majeure 82. Globalisations esthétiques

Orientations
Vers une phénoménologie queer

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Le couple queer1, dans un espace hétéro, apparaît parfois comme un couple qui penche du mauvais côté : c’est un couple oblique. Asseyez-les à une table sagement l’un en face de l’autre –  rien à faire : dans bien des cas, les couples queer auront toujours l’air de ne pas être à leur place. Que se passe-t-il si l’on commence à examiner les potentiels de désorientation que recèle l’oblique2 ?

Merleau-Ponty a donné un compte rendu détaillé d’une expérience où le monde, justement, devient oblique :

« Si l’on s’arrange pour qu’un sujet ne voie la chambre où il se trouve que par l’intermédiaire d’un miroir qui la reflète en l’inclinant de 45° par rapport à la verticale, le sujet voit d’abord la chambre “oblique”. Un homme qui s’y déplace semble marcher incliné sur le côté. Un morceau de carton qui tombe le long du chambranle de la porte paraît tomber selon une direction oblique. L’ensemble est “étrange”3. »

Redressement

Ainsi se produisent, dans la Phénoménologie de la perception des moments où le monde n’a plus l’air de tenir debout, où les choses penchent, tombent à l’oblique. À la suite de cette description, Merleau-Ponty se demande comment la relation du sujet à l’espace se trouve réorientée : « Après quelques minutes, un changement brusque intervient : les murs, l’homme qui se déplace dans la pièce, la direction de chute du carton deviennent verticaux4. » Cette réorientation, qu’on peut décrire comme une re-verticalisation de la perspective, implique que la désorientation soit surmontée et que les objets du monde cessent d’apparaître décentrés ou penchés. Merleau-Ponty étudie la manière dont les sujets redressent l’étrangeté de certaines orientations. Pour cela, il conçoit un modèle de l’espace dont la forme n’est pas déterminée par des coordonnées objectives (où le haut et le bas existeraient indépendamment de l’orientation corporelle) mais par l’intentionnalité du corps. Pour Merleau-Ponty, le corps fait des choses dans l’espace, et l’espace prend la forme de son champ d’action : « Ce qui importe pour l’orientation du spectacle, ce n’est pas mon corps tel qu’il est en fait, comme chose dans l’espace objectif, mais mon corps comme système d’actions possibles, un corps virtuel dont le “lieu” phénoménal est défini par sa tâche et par sa situation. Mon corps est là où il a quelque chose à faire5. »

Ceci implique que les moments d’étrangeté (ces moments dans lesquels les objets apparaissent penchés, dans lesquels les axes verticaux et horizontaux sortent de leurs gonds) doivent être surmontés non pas parce qu’ils contredisent les lois qui gouvernent l’espace objectif, mais parce qu’ils empêchent l’action corporelle : ils inhibent le corps, ils l’empêchent de prendre sa place dans l’espace. Pour Merleau-Ponty, si le corps redresse son point de vue sur le monde, c’est pour pouvoir y prendre place.

Nous pourrions être tenté·es, à la lumière de la discussion merleau-pontyenne de ces moments de désorientation, de reconsidérer la relation entre normativité et verticalité. Considérons la norme comme le résultat d’actions corporelles qui se répètent dans le temps et qui produisent par là ce que j’ai appelé un « horizon corporel », un espace d’action, qui place certains objets plutôt que d’autres à portée de main. On peut décrire cette dimension normative dans les termes de notre problème : la norme est un processus par lequel le corps est redressé –  il s’aligne. Les choses sont redressées (sur leur axe vertical) quand elles sont alignées, c’est-à-dire, quand elles sont alignées sur d’autres lignes. Plutôt que de présupposer la ligne verticale comme un simple donné, on pourrait ainsi considérer la ligne verticale comme l’effet de processus d’alignements.

Pour que les choses s’alignent, il faut corriger les moments où les orientations apparaissent comme étranges ou dérangées. On pourrait décrire l’hétéronormativité comme un tel dispositif de redressement, qui traduit et redresse le « penchant » du désir queer.

[…] Pour changer d’orientation, pour passer d’hétérote à lesbienne par exemple, il est nécessaire de réapprendre à habiter son corps, car ce changement d’orientation implique que je cesse de faire corps avec l’espace, que je me détache de l’enveloppe du social. C’est en ce sens que le sexe de l’objet élu par le désir ne concerne pas seulement l’objet de ce désir, même quand le désir n’est orienté que vers lui : il affecte aussi le répertoire d’actions qui nous sont disponibles, celui des lieux où nous sommes susceptibles d’aller, des manières dont nous sommes perçu·es, et quantités d’autres choses. Ces différences touchent, indissociablement, à la manière dont je dirige mon désir et à la manière dont les autres me regardent, m’affectent et affectent en conséquence mes schémas relationnels les plus profondément enracinés. Et je ne veux pas dire par là qu’en changeant d’orientation sexuelle, nous transcendions ou fassions table rase de nos histoires. Ce que je veux dire, c’est qu’un tel basculement d’orientation ne peut être vécu comme une simple continuité avec la ligne de vie qui le précède, car la bascule n’affecte pas seulement le désir, mais toutes les choses que le corps est susceptible de faire.

Teresa de Lauretis distingue les lesbiennes qui « ont toujours été comme ça » et celles qui « deviennent lesbiennes ». Cette distinction n’implique pas que les lesbiennes qui ont toujours été « comme ça » n’aient pas à devenir lesbiennes ; simplement, cela indique qu’il est possible qu’elles aient à le devenir d’une manière différente. Chaque processus par lequel une personne devient lesbienne implique une temporalité spécifique, et même les lesbiennes qui ont toujours été « comme ça » doivent devenir lesbiennes, c’est-à-dire qu’elles doivent assembler en elles certaines tendances et leur donner des formes sociales et sexuelles spécifiques. De tels assemblages requièrent, comme dit Lauretis, un « changement d’habitudes6 », ils requièrent une réorientation du corps telle que de nouveaux objets se présentent à portée de main. C’est du temps et du travail que de devenir un corps lesbien. L’acte de tendre vers d’autres femmes a besoin d’être répété, le plus souvent dans un contexte d’hostilité et de discrimination, pour pouvoir assembler ces tendances et leur donner des formes pérennes. Comme telles, les tendances lesbiennes n’ont pas d’origine qu’on pourrait identifier en dehors du contact que nous avons avec les autres –  contact qui à la fois est informé par nos tendances et leur donne leurs formes.

Queer / Orientation

[…] Peut-être est-il temps, à ce propos, de souligner l’intérêt qu’il y a à utiliser ce mot, queer, dans des sens distincts qui cependant ne cessent de glisser les uns dans les autres. J’ai utilisé le mot queer pour signaler l’oblique : ce qui ne se tient pas droit, ce qui ne s’aligne pas, ce qui apparaît dérangé. Mais j’ai aussi utilisé le mot queer pour décrire les pratiques sexuelles non-hétéro –  et en particulier le lesbianisme  – comme autant de formes sociales et sexuelles du contact entre les corps. Je pense qu’il est crucial de conserver les deux sens de ce mot queer, « mal orienté/désorientant » et « queer » au sens de allosexuel. La racine du mot queer en anglais, renvoie à un mot grec qui signale ce qui se trouve en travers, ce qui est oblique, ce qui est adverse7. Ce mot, queer, nous donne une chance, celle de sinuer entre les registres sexuels et sociaux sans chercher à les aplatir ou à les réduire l’un à l’autre.

Désorienter les choses, c’est perturber un certain ordre du monde. Or puisque le monde est organisé autour de certaines formes de vie (certains temps, certains espaces, certaines directions), les effets d’une telle perturbation s’y distribuent inégalement. Il peut être utile ici, à la suite de Michael Moon, de penser à la désorientation sexuelle sous les espèces de « l’inquiétante étrangeté8 ». Par quoi il faut entendre la manière dont la désorientation sexuelle se transforme en désorientation de l’ordre social : une désorientation dans la manière dont les corps sont susceptibles de se rencontrer et dont les choses sont arrangées entre elles. Et les effets ne peuvent être que troublants quand le familier (c’est-à-dire ce qui est ordinairement relégué sous le voile du familier) se présente avec le visage de l’étranger.

Dans la Phénoménologie de la perception, Merleau-Ponty met en parallèle deux distinctions : celle qui distingue le « droit » de l’« oblique » et celle qui distingue la « distance » de la « proximité ». La distance se donne chez lui comme l’expression d’une certaine perte : la distance, c’est ce point où ce qui se trouve à portée de main menace de cesser de l’être. L’objet qui sort du rang, l’objet qui penche, l’objet étrange et étranger, cet objet ne se rencontre que sur le mode de la dérobade, que sur le mode de la menace de n’être plus atteignable.

Une phénoménologie queer implique une telle orientation envers ce qui se dérobe. Elle pose la question de savoir : qu’est-ce qui permet à quoi de se dérober ? En d’autres termes, une phénoménologie queer fonctionne comme un dispositif de désorientation. Elle ne cherche pas à surmonter l’ébranlement des axes verticaux et horizontaux, elle cherche plutôt à permettre à l’oblique d’ouvrir de nouveaux angles de vue sur le monde. Définir ainsi le queer comme ouverture à ce qui dévie, comme manière de s’approcher de cela qui se retire, c’est les autoriser à glisser entre plusieurs de ses sens, de l’orientation sexuelle à d’autres formes d’orientation. Dans ce cadre, queer peut définir ainsi une certaine manière d’approcher les objets à partir de leurs dérobades, une manière d’habiter le monde à l’endroit même où les choses s’en retirent.

La désorientation provient de certains points particuliers, de ces mondes vécus habités par celleux qui ne veulent ou ne peuvent pas vivre dans les contours de l’espace hétérosexuel. Après tout, n’est-il pas vrai qu’il arrive à certain·es d’entre nous d’avoir l’air dérangé·es ? Certaines personnes me reprochent d’exagérer ce dernier point et de cantonner la déviance dont je parle à des moments et à des espaces où « résident » celle·ux qui ne pratiquent pas l’hétérosexualité. Ainsi, on m’a objecté : n’est-il pas vrai que les lesbiennes et les gays aussi ont « leurs lignes », qu’elleux aussi ont leurs manières bien à elleux de ranger et de redresser les choses ? Ou encore : les lesbiennes et les gays ne sont-iels pas « tout aussi conservateurices » que les autres ? Je répondrais ici en insistant sur cela que « queer », pour moi, décrit une orientation au moins autant sexuelle que politique, et que perdre de vue la spécificité sexuelle de la déviance, ce serait aussi perdre de vue la manière dont l’hétérosexualité obligatoire informe et homogénéise des ensembles disparates de faits qui finissent par apparaître comme évidents. Et ce serait aussi perdre de vue les effets de cette homogénéité sur celleux qui refusent d’entrer dans le rang. Comme Leo Bersani le dit, il ne s’agit pas ici de présupposer que « queer » renvoie à des personnes ou à des pratiques effectives : nous n’avons pas besoin de stabiliser le « queer » comme une catégorie identitaire pour étudier la spécificité sexuelle que les queers représentent et pourquoi elle importe9. Simplement, nous avons besoin de dire que cela compte : cela compte de se situer à l’oblique de l’homogène ; cela compte d’être à l’oblique de ce point où l’homogénéisation nous met sur le droit chemin de l’hétérosexualité.

Bien sûr, il faut reconnaître qu’il est vrai qu’on peut avoir une orientation sexuelle « non-hétéro » et être hétéroredressé·e par ailleurs. Il est possible de vivre une vie oblique et cependant, de suivre des lignes droites. Il y a même des homosexuel·les suffisamment conservateurices pour exiger des lesbiennes et des gays qu’iels entrent dans le rang hétéro, notamment en les engageant à adopter la forme de la famille, même s’iels ne peuvent guère habiter cette forme sans produire un certain effet de désorientation. Lisa Duggan et Judith Habelstram ont proposé des critiques convaincantes de cette « hétéronormativité10 », en montrant notamment la manière dont cette politique homonormative « ne conteste pas les institutions hétéronormatives dominantes, au contraire, elle les défend et les maintient 11. »

Politique de la  désorientation

On pourrait dire que cette homonormativité relève d’une politique assimilationniste : une politique de la ligne à suivre, qui s’applique à tous les corps, y compris les corps queers. L’homonormativité hétéroredresse les effets queers en les faisant passer par certains points qui, par accumulation, réalignent la désorientation qu’ils provoquent (ces « bons points » qu’on vous donne à chaque étape franchie : mariage, enfants,  etc.) C’est ainsi que Butler peut dire que le mariage gay, loin de remettre en cause le conservatisme du mariage, ne fait qu’en étendre le domaine d’application12. La politique assimilationniste étire la ligne hétéro, qui se rend alors capable d’abriter certaines désorientations queers, celles qui peuvent investir les formes du mariage et de la famille –  ce qui a pour effet d’en exclure les autres, celleux dont les vies passent par d’autres points. Lee Edelman considère que la politique hétéronormative relève d’un « futurisme reproductif » : elle fonctionne « en affirmant une structure et en garantissant un ordre social qu’il s’agit de léguer aux futures générations sous la forme de l’Enfant13. »

[…] Nous appelons à une politique de la désorientation, mais cela ne veut pas dire que nous voulions faire de la désorientation une obligation ou une responsabilité pour celleux qui s’identifient comme queers. D’abord, ce serait à la fois trop demander (pour certain·es, dédier une vie à la désorientation n’est pas psychiquement ou matériellement possible ou soutenable, même si leurs désirs sont plutôt obliques) et surtout ne pas en demander assez (ce serait trop facile, pour celleux qui suivent les lignes hétéroredressées du désir, de ne pas les quitter). Ce n’est pas la tâche des queers de désorienter les hétéro·tes, même si bien sûr de telles désorientations peuvent avoir tendance à se produire quand nous faisons ce genre de travail pour nous. La politique de la désorientation n’est en ce sens pas une politique volontariste, mais un effet de la manière dont nous pratiquons la politique, pratique qui est elle-même informée par la manière dont nous vivons.

Ainsi, il est possible de suivre certaines lignes (telles que la ligne familiale) dans l’intention de provoquer la désorientation, pour faire l’expérience des plaisirs de la désorientation. Pour certain·es d’entre nous, par exemple, l’acte de décrire les collectifs queer auxquels nous prenons part comme des « familles » n’est pas sans receler une certaine joie : celle de produire un effet d’« inquiétante étrangeté », où la forme familière de la famille se présente comme étrangère. Dans un tel cas, suivre la ligne, ce n’est pas jurer fidélité au familier, c’est au contraire inquiéter le familier, voire permettre à ce qui a été oublié, ce qui semblait faire partie des meubles, d’entrer dans la danse, de reprendre vie. C’est ce que Kath Weston a montré dans son ethnographie des parentés queer. Comme elle le dit, « loin de considérer les familles que nous choisissons comme de simples imitations ou comme des dérivés des liens familiaux qui se créent ailleurs dans la société, de nombreuses lesbiennes et de nombreux hommes gays parlent de la difficulté et de l’excitation associée à la construction de formes de parentés en l’absence de “modèles”14. »

Une politique queer implique un certain engagement, une certaine manière d’habiter le monde, même si cette manière ne repose pas nécessairement sur les queers. Comme le dit Halberstam, le domaine du queer commence avec « la potentialité d’une vie dont les contours ne sont pas prescrits par les conventions de la famille, de l’héritage et de l’éducation des enfants15. » En combinant les propos de Weston et d’Halberstam, on peut suggérer que les vies déviantes sont des vies où s’expérimente la potentialité de ne pas suivre certaines prescriptions liées à la famille, à l’héritage et à l’éducation des enfants, potentialité par laquelle l’action de se désaligner peut s’apparenter à la désorientation : le monde passe à l’oblique, et l’oblique ouvre de nouvelles manières d’habiter ces formes.

Regarder en arrière nous aide à trouver en nous cette possibilité de la dérive –  regarder en arrière, ou passer par-derrière, ou faire apparaître la face cachée d’un objet. Plutôt que de refuser le futur, j’aimerais suggérer qu’une politique queer pourrait être une politique fondée sur l’espoir. Et si nous avons espoir, ce n’est pas par sentimentalisme. C’est parce que nous savons qu’à force de répéter certains gestes, des nouvelles lignes finissent par se dessiner, qui creusent leurs sillons dans les chairs et créent les formes les plus surprenantes. Les architectes-paysagistes utilisent le terme de chemins de désir pour décrire ces sortes de chemins clandestins, ces marques laissées sur le sol par les allers et venues quotidiennes de certain·es personnes qui, au lieu de suivre les routes qu’on leur avait tracées, créent leurs propres voies. En suivant ces chemins de désir, on se rend capable de générer des paysages désorientés.

Traduit de l’anglais
(Royaume-Uni / Australie)
par Romain/Emma-Rose Bigé & Daphné Pons

1 NdT : Dans ce texte, qui s’interroge plus spécifiquement sur les rapports entre non-conformité de genre et désorientation spatiale, nous avons choisi de rendre queer tantôt par « queer », tantôt par « désorientant·e » ou « désorientation ». Traduire queer par « queer » n’est pas un refus de traduction, mais un effort pour respecter les imaginaires hétérolingues des communautés francophones qui, aux côtés de traductions telles que « transpédégouines » ou « torduEs », utilisent souvent le terme dans sa langue d’origine. Quant à « désorientation », ce choix s’appuie sur l’un des sens du mot en anglais, sur lequel joue Sara Ahmed, et qui veut que queer renvoie étymologiquement au bizarre, au tordu, à ce qui se trouve de travers, bref, à ce qui n’est pas droit (pas straight, c’est-à-dire aussi, pas très hétéro).

2 Ce texte est constitué d’extraits de l’article de Sara Ahmed, « Orientations: Toward a queer phenomenology. » GLQ, A Journal of Lesbian and Gay Studies, 2006, vol. 12 (4).

3 Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 1945, p.  287. NdT : L’expérience dont parle Merleau-Ponty est relatée par Max Wertheimer, dans ses Experimentelle Studien über das Sehen von Bewegung (in F. Schumann (dir.), Zeitschrift für Psychologie, tome 1, Leipzig, 1912, p.  258). En allemand, Wertheimer parle d’une « chute très étrangement oblique » (sehr seltsames schräges Fallen) et d’une image visuelle qui apparaît « très étrange, spéciale » (seltsam wirkt, sonderlich). En français, Merleau-Ponty traduit par « étrange ». En anglais, Colin Smith, le traducteur de la Phénoménologie de la perception (Phenomenology of Perception, Londres et New York, Routledge, 1962) traduit par « queer » –  c’est sur ce choix de traduction que se fonde, en partie, l’argument d’Ahmed.

4 Merleau-Ponty, op.  cit., p.  287.

5 Ibid., p.  289.

6 Teresa de Lauretis, Practices of Love: Lesbian Sexuality and Perverse Desire, Bloomington, Indiana University Press, 1994, p.  300.

7 Fabio Cleto, « Introduction to Queering the Camp », in Camp: Queer Aesthetics and the Performing Subject : A Reader, Fabio Cleto (ed.), Ann Arbor, University of Michigan Press, 2002, p.  13. NdT : le texte ne précise pas de quel mot grec il s’agit. Il est probable qu’il s’agisse de τρόπος, qui donne le français « trope », tour ou figure de style, et qui provient du verbe τρέπω, « tordre ». Tous deux sont apparentés à l’indo-européen *terk  – dont les multiples dérivés en latin (torqueo : tourner, courber, faire changer de direction ; en français « torque »), en allemand (quer : à travers / en travers) et en anglais (thwart : contrarier, contrecarrer) pointent en effet vers des sens similaires au mot queer.

8 Michael Moon, A Small Boy and Others: Imitation and Initiation in American Culture from Henry James to Andy Warhol, Durham, NC, Duke University Press, 1998, p.  16.

9 Leo Bersani, Homos, Cambridge, MA, Harvard University Press, 1995, p.  16.

10 Lisa Duggan, The Twilight of Equality : Neoliberalism, Cultural Politics, and the Attack on Democracy, Boston, Beacon, 2003 ; et Judith Halberstam, In A Queer Time and Place: Transgender Bodies, Subcultural Lives, New York: New York University Press, 2005.

11 Lisa Duggan, ibid., p.  50 ; je souligne.

12 Judith Butler, « Is Kinship Always Already Heterosexual? », differences: A Journal of Feminist Cultural Studies, vol. 13, no. 1, 2002, p.  18.

13 Lee Edelman, No Future: Queer Theory and the Death Drive, Duke University Press, 2004, p.  30.

14 Kath Weston, Families We Choose, Columbia University Press, 1991, p.  116. Voir également le chapitre « Queer Feelings » dans mon livre, The Cultural Politics of Emotion.

15 Judith Habelstram, Queer Time, op.  cit., p.  5.