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Le proviseur d’un lycée de Mende proteste après sa révocation pour un blog jugé pornographique

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LE MONDE | 20.01.06 | Des centaines de message de soutien, une pétition sur Internet qui, vendredi 20 janvier, avait déjà recueilli près de 1 500 signatures. Une semaine après la révocation par le ministère de l’éducation nationale du proviseur du lycée Peytavin de Mende, la blogosphère se mobilise. Agé de 48 ans, Michel Collet, en poste dans cet établissement de Lozère depuis septembre 2005, a été limogé pour avoir animé, sous le pseudonyme de Garfieldd, un blog dans lequel il évoquait notamment son homosexualité. “Sur ce blog se trouvaient des écrits et des photos à caractère pornographique, incompatibles avec l’exercice de la responsabilité d’un chef d’établissement”, indique Paul Desneuf, directeur de l’encadrement du ministère de l’éducation nationale.
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Selon l’arrêté de révocation, que Le Monde s’est procuré, le ministère de l’éducation reproche à M. Collet “d’avoir manqué à ses obligations déontologiques en publiant sur son blog des propos portant atteinte à la dignité des fonctions qu’il exerce et plus généralement aux pouvoirs publics”. Il accuse aussi le proviseur “d’avoir manqué de fidélité aux devoirs de sa fonction en donnant de son emploi de chef d’établissement, ainsi que de celui d’autres agents de l’éducation nationale, une image déshonorante et indigne”.

La décision s’est notamment appuyée sur un rapport des services du rectorat de Montpellier daté du 12 octobre 2005, transmis au directeur de l’encadrement du ministère de l’éducation. A ce document étaient jointes des pièces complémentaires, notamment des captures d’écran du blog de M. Collet

Le cas du proviseur de Mende a été examiné le 9 décembre 2005 par la commission paritaire nationale disciplinaire, où siègent six représentants de l’administration et six représentants du personnel. Cette instance a appuyé sa décision sur un certain nombre d’accusations à son encontre. Il lui a entre autres été reproché “d’avoir diffusé des textes et des photos évoquant ses expériences sexuelles, parfois de manière explicitement obscène ou pornographique. Parmi ces photos figure M. Collet. Par ce blog il rend publiques des correspondances (…) avec d’autres détenteurs de blog qui lui répondent sur des thèmes manifestement pornographiques, l’un des correspondants, au moins, diffusant des photos où des mineurs sont représentés à côté d’adultes”. Dans l’entourage du proviseur, on dénonce cet argument comme fallacieux : “M. Collet ne peut pas être rendu responsable du contenu d’un site dont il n’est pas l’auteur.”

Pour étayer les accusations lors de la commission disciplinaire, cinq extraits du blog de M. Collet ainsi que cinq clichés ont été présentés. Quatre de ces photographies représentent des hommes en sous-vêtements. Sur toutes ces photographies, seule est visible la partie entre le milieu du torse et le haut des cuisses. Aucun visage n’est montré. La cinquième photo est un document personnel du proviseur. Celui-ci y apparaît allongé nu sur une plage, sur le ventre. Son visage, ses épaules et ses fesses sont visibles. Légalement, ce type de cliché ne peut pas donner matière à poursuite.

A l’issue d’un vote, la commission a émis un avis favorable à la révocation de M. Collet. Le proviseur a d’ores et déjà émis un recours gracieux auprès du ministre de l’éducation nationale. Il compte en déposer un autre dans le courant de la semaine prochaine auprès du Conseil supérieur de la fonction publique. Dans l’hypothèse d’un rejet, il peut intenter une action devant le tribunal administratif.

Appuyé par le Syndicat des personnels de direction de l’éducation nationale (SNPDEN), M. Collet affirme qu’il n’y avait rien d’obscène sur son blog. “Pendant les deux ans où j’ai animé ce journal, je n’ai jamais mis de photographies sexuellement explicites. Pas de nudité frontale ou de couple en action (…). Je peux comprendre que certains puissent juger ces clichés déplacés, mais en aucun cas ils ne peuvent être qualifiés de pornographiques”, affirme M. Collet.

“S’agissant de mes écrits, se défend le proviseur, il s’agissait d’un journal intime, visité par une quarantaine de lecteurs réguliers. J’y évoquais donc ma vie personnelle mais aussi des épisodes de ma vie professionnelle. J’ai toujours utilisé un pseudonyme et pris la précaution de ne citer aucun nom de personne ou de lieu. Je veux bien admettre que j’ai agi avec légèreté et que j’aurais dû être plus prudent, car par recoupement on a réussi à m’identifier mais en aucun cas on ne peut m’accuser de diffamation ou d’atteinte aux bonnes moeurs.”

Pour Georges de Haro, responsable académique du SNPDEN, la sanction est disproportionnée : “Dans ce dossier il n’y a pas de preuve formelle, circonstanciée d’un caractère répréhensible de quelque nature que ce soit. Or il écope de la sanction la plus grave et la plus définitive qui puisse toucher un fonctionnaire, sans qu’aucune poursuite judiciaire n’ait été entamée.”

Le blog de Garfieldd a été découvert par hasard par des enseignants d’un établissement voisin à la recherche de blogs d’élèves critiquant les professeurs. Ils ont décidé d’en avertir leur hiérarchie. Le 11 octobre, le proviseur a été convoqué par l’inspection académique de la Lozère, qui lui reprochait de mélanger sur son blog vie professionnelle et vie personnelle et d’être identifiable. M. Collet a alors pris l’engagement de fermer son blog. Le soir même, l’accès à son journal n’était plus possible. Quelques jours plus tard, sur un forum de discussion, il diffusait un texte dans lequel il précisait que son blog reviendrait, “différent et terriblement identique”.

Le 20 octobre, Michel Collet était convoqué au rectorat de l’académie de Montpellier, où il était informé de sa suspension et qu’une procédure disciplinaire était engagée contre lui. Le 9 janvier, un mois après sa comparution devant la commission disciplinaire, le rectorat de Montpellier lui a fait part de sa révocation. Cette sanction, la plus grave pour un fonctionnaire, lui interdit de travailler dans la fonction publique.

C’est la première fois qu’un membre du personnel de direction est révoqué sans avoir au préalable fait l’objet d’une procédure judiciaire. Selon le ministère, la révocation de fonctionnaires de l’éducation nationale représente moins d’une vingtaine de cas par an. Les causes principales : détournements de fonds, vols de matériel, agressions sur mineurs ou condamnations pénales diverses. Moins de cinq personnes sont licenciées, chaque année, pour insuffisances professionnelles.