Après les votes de l’Assemblée nationale et du Sénat, le très controversé projet de loi sur le droit d’auteur qui vise notamment à empêcher tout téléchargement illégal ou copie sauvage sur l’Internet est définitivement adopté.
La loi sur le droit d’auteur dans la société de l’information avait d’abord été adoptée par le Sénat dans la version qu’en ont élaboré quatorze députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire (CMP). Le rapporteur Michel Thiollière (UMP) l’a jugé “équilibré, ambitieux et juste”. “Il montre que la France est capable d’agir et de porter un message fort d’audace et de modernité”, a estimé pour sa part le ministre de la culture, Renaud Donnedieu de Vabre
Le vote a eu lieu à main levée. Dominique Braye, pour l’UMP, a indiqué que la “quasi-totalité” de son groupe était en faveur de ce texte, la gauche a indiqué qu’elle votait contre, et l’UDF qu’elle était partagée, mais que la majorité de ses membres s’abstenaient. Dans la discussion générale, les intervenants – David Assouline (PS), Jack Ralite (PCF) et Catherine Morin-Desailly (UDF) – ont surtout dénoncé, au-delà de dispositions techniques qui les divisent, le refus du gouvernement de procéder à une deuxième lecture de ce projet de loi qui a opté pour le passage en force.
L’INDUSTRIE DU DISQUE SE RÉJOUIT
Les clivages demeureront bien après le vote de la loi. D’un côté, l’industrie du disque se réjouit : Le Syndicat national de l’édition phonographique assure dans un communiqué que le nouveau texte “assure tout à la fois la protection des œuvres sur Internet et le bénéfice pour le consommateur de continuer à pouvoir effectuer des copies à titre privé. Il permettra aussi de mettre en place, la France étant en ce domaine pionnière, l’interopérabilité pour assurer l’écoute de la musique sur tous les supports sans pour autant supprimer les mesures de protection.”
Pour sa part l’Alliance public-artistes, qui rassemble 16 organismes représentant le public et les artistes, affirme le contraire : “Le texte n’apporte toujours aucune solution viable, juridiquement ou économiquement, pour les artistes comme pour le public, au problème de la circulation, de l’échange et de la copie des œuvres sur Internet. La sanctuarisation des DRM [mesures techniques de protection, outre les difficultés que ces derniers posent en termes de respect de la vie privée et d’interopérabilité, n’empêchera en aucun cas leur contournement.”
Des mois de débats n’ont pas rapproché les parties dont les analyses demeurent antagonistes.
INSÉCURITÉ FINANCIÈRE MASSIVE
Toutefois, pour bien comprendre le mécanisme futur de la lutte “antipiratage”, il manque encore les modalités d’application de la loi par le gouvernement, notamment le régime des amendes pour les contrevenants. La loi prévoit une amende de 38 euros pour le téléchargement, 150 pour la mise à disposition. Est-ce que ces amendes s’appliquent pour chaque unité échangée ou concernent l’infraction dans sa globalité ?
Du côté même de la Sacem comme de la SCPP, on doute que le principe de l’amende soit appliquable à chaque morceau “piraté”. En effet une telle situation pourrait potentiellement provoquer un raz de marée de contraventions avec pour résultat des centaines de milliers d’internautes redevables de sommes astronomiques. Une manœuvre particulièrement maladroite à quelques mois d’une échéance électorale majeure. Néanmoins, depuis le début des discussions sur ce dossier, le ministère de la culture a conservé une oreille très attentive aux doléances des industriels.
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