La condition des immigrés, la discrimination dont ils font l’objet, échappent à la statistique color blind. Les différenciations sur des bases ethniques et raciales contredisent en apparence les visées du modèle français, égalitaire et universaliste. Mais leur prise en compte peut concourir à la lutte contre les inégalités et constituer un préalable à la réalisation de l’universalité.
The living conditions of migrants, the discrimination to which they are exposed, does not appear on our colour-blind statistical radars. Categories based on ethnicity and race apparently contradict the goals of the French model, egalitarian and universalist. But accounting for them can help greatly in the struggle against inequalities, and constitutes a precondition to real universality.
Deux directives européennes prises en juin et novembre 2000 ont introduit la notion de discrimination indirecte dans le droit européen. Leur transposition dans le droit français s’est opérée à l’automne 2001, complétée en janvier 2002 par la loi de modernisation sociale. En cinq années, un dispositif d’intervention s’est progressivement mis en place mais a montré ses limites face à ce qui apparaît plus comme un système ou un ordre discriminatoire que comme des cas isolés qu’il conviendrait de sanctionner. En moins de dix ans, si les progrès de l’action publique n’ont sans doute pas été spectaculaires, la question des discriminations est indéniablement devenue un problème public et figure sans discontinuer sur l’agenda politique et dans les programmes de recherche.
Le principal apport des directives européennes de 2000 est de diffuser la notion de discrimination indirecte, qui ouvre sur le concept plus sociologique de discrimination systémique. Celle-ci est définie par la directive dans son article 2 comme « une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre et susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires ». Il découle de cette acception de la discrimination qu’elle ne préjuge pas d’une intention d’un acteur malveillant, et qu’elle s’apprécie essentiellement dans ses conséquences, ces dernières ne s’appréhendant que par comparaison. Cela suppose d’avoir au préalable construit les groupes à comparer (le groupe-cible d’une « race ou d’une origine ethnique donnée » et les « autres personnes »), puis de saisir les indicateurs susceptibles de décrire les discriminations subies : carrières professionnelles, niveaux de rémunération, trajectoires scolaires, durées d’attente pour un logement HLM, nombre de refus d’un logement sur le marché privé, taux de consommation médicale, proportion de refus de prêts bancaires… In fine, la notion de discrimination indirecte suppose, de façon implicite, que l’on dispose de « preuves statistiques » pour mettre en évidence son existence.
Sur un double plan théorique et politique, le développement de la non-discrimination ouvre de nouvelles perspectives (ou renforce des anciens axes d’intervention négligés) par sa force de révision des systèmes sociaux. En poussant à déconstruire les modes d’allocations des ressources, les logiques de sélection et les formes masquées de hiérarchisation, l’analyse des discriminations constitue un dévoilement des fondations des sociétés, fondations occultées car recouvertes par les structures apparentes. Il en va ainsi des inégalités de genre, longtemps méprisées et reléguées au rang des contradictions subalternes. Il en va de même avec les discriminations raciales qui cumulent un fort discrédit lié au « racial » en tant que tel avec une illégitimité de la subdivision transversale au clivage de classe. L’approche en termes de discriminations invite donc à bousculer plusieurs niveaux de lecture des sociétés capitalistes, interrogeant les logiques de hiérarchisations à l’œuvre, d’une part, et les moyens de transformation sociale d’autre part. Il n’est pas indifférent ici que les travaux très empiriques d’observation et d’analyse des mécanismes discriminatoires rencontrent les débats autour des théories de la justice et de l’égalité. On avancera dans ce texte que l’enjeu que constitue la production de statistiques sur les discriminations raciales touche à ces différents niveaux de lecture et permet d’appréhender non seulement l’intelligibilité du social mais également les stratégies de transformation des systèmes de domination qui structurent les discriminations.
L’approche par la statistique : identification, évaluation, correction
L’analyse de cette discrimination systémique induit donc un renversement des perspectives. Il ne s’agit plus de s’intéresser aux auteurs des discriminations et aux pratiques individuelles, mais bien d’examiner leurs conséquences : qui sont les victimes ? À quoi ont-ils accès, en fonction de leur origine ou de leur race ?… Ce programme d’identification des conséquences des discriminations n’est qu’un prélude à l’analyse des mécanismes par lesquelles elles se produisent. Cependant, ce tableau statistique est indispensable pour construire un diagnostic partagé, en particulier sur une question aussi sensible qui fait l’objet d’un déni puissant dans la société française. Au-delà des dénonciations de principe – personne ne justifie l’existence de discriminations -, la reconnaissance de situations concrètes de discrimination bute sur la multiplicité des paramètres entrant en ligne de compte. La position sociale, le sexe, l’âge, le quartier : les victimes cumulent une série de caractéristiques qui forment autant de sources d’inégalités ou de discriminations. Difficile dans ces conditions de faire admettre l’existence d’une discrimination ethnique ou raciale.
À des fins d’identification, il importe alors de dresser un bilan décrivant les conditions d’existence des populations susceptibles d’être discriminées. Mais l’approche statistique bute sur la difficulté majeure d’identification des populations concernées par les discriminations. Si les étrangers sont juridiquement reconnus par leur nationalité, les Français d’origine étrangère ou les « jeunes issus de l’immigration » n’existent pas comme catégorie statistique. L’information sur les origines ne figure dans aucun fichier administratif ou recensement et apparaît rarement dans les différentes enquêtes effectuées par la statistique publique. La connaissance de la situation des personnes d’ascendance immigrée repose sur des sources indirectes et quelques enquêtes, mais l’absence totale d’information dans le recensement interdit tout projet d’ethnic monitoring à un niveau local, tel qu’il est pratiqué notamment en Grande-Bretagne.
L’absence d’identification dans l’appareil statistique repose évidemment sur la stratégie d’indifférenciation/invisibilisation qui est à la base de la politique d’égalité. Dans la conception philosophico-politique républicaine, l’égalité s’obtient par un arasement des différences, ce qui commence par leur neutralisation dans l’espace juridique et politique, et par extension dans « l’espace public ». Or cette invisibilisation reste purement formelle et n’est pas respectée dans les pratiques où, au contraire, on assiste à une extension de la prise en compte d’identifications et de référents ethniques et raciaux. Cette diffusion, qui n’est pas aussi récente que l’on veut bien le croire, est souvent qualifiée « d’ethnicisation » ou de « racialisation » des rapports sociaux, ce qui laisserait supposer qu’aurait existé un âge d’or de ces rapports où ils n’étaient pas corrompus par le racisme ou la perception de « différences ethniques et raciales ». Or il semble bien que la « race » est partie intégrante de tous les rapports sociaux dès qu’ils se confrontent à la diversité, réelle ou imaginaire, et qu’en ce sens la « race » n’a jamais réellement été tenue à distance ou neutralisée. Elle ne s’imposait pas comme catégorie pratique de gestion des rapports sociaux dans les métropoles occidentales, mais elle se déployait dans ses marges coloniales ou dans les interstices urbains post-coloniaux. L’émergence de la thématique des discriminations agit comme un révélateur de cette omniprésence de la « race » dans les sociétés mêmes qui avaient cru s’en débarrasser. D’une certaine façon, les statistiques sont porteuses d’une mauvaise nouvelle : on aimerait mieux les oublier.
Quelle catégorie ?
Dans le cas français, l’exploitation de rares enquêtes comprenant une référence à « l’origine » des individus et l’utilisation de variables bricolées à partir du recensement ont permis de mettre en évidence l’existence d’inégalités expérimentées par certains groupes de descendants d’immigrés – essentiellement d’origine maghrébine, d’Afrique sub-saharienne et turque – dans les domaines de l’emploi, avant tout, mais également de l’éducation, du logement, de la santé… Ces inégalités peuvent s’analyser à partir de la grille de lecture des positions sociales, mais il subsiste une source spécifique d’inégalités qui, sans équivoque, est liée à l’origine ethnique et raciale des membres de ces groupes. Cela ne signifie pas que « l’ethnique » se substitue au social, mais qu’au contraire ils se combinent dans les dynamiques de subordination, de précarisation économique et de dévalorisation symbolique. On peut dès lors douter de la cohérence d’une analyse color blind des inégalités sociales qui ne prennent pas en compte les discriminations spécifiques, ou tout simplement supplémentaires, que subissent des populations en raison de leur origine, réelle ou supposée. Plus encore, la cécité plus ou moins volontaire des statistiques sur la condition des immigrés et plus largement des minorités ethniques et raciales contribue à relativiser la gravité des atteintes à la dignité et aux droits.
Les catégories statistiques constituent avant tout des conventions qui désignent tout autant des objets de connaissance que des sujets d’actions et de politiques. En ce sens, elles ne prétendent pas refléter une réalité objective, mais forment une représentation légitime du monde social, historiquement situé dans les sociétés qui les utilisent et les rendent possibles (Desrosières, 1993). En France, la catégorisation selon la nationalité a prévalu de façon exclusive depuis la fondation de la IIIe République et s’est traduite par l’adoption dans le recensement, dès 1851 avant une stabilisation en 1891, d’une nomenclature statistique en trois positions distinguant les Français de naissance, les Français par acquisition et les étrangers. Ce triptyque répond à une double problématique de gestion des flux et d’observation du processus d’assimilation à la nation, défini selon le fameux modèle d’intégration à la française par l’adoption de la nationalité française. Dans la perspective du modèle, politique avant de devenir analytique, les différentes étapes d’entrée dans la citoyenneté déterminent la prise en compte de l’immigration : installation, incorporation dans l’appareil économique, développement des liens familiaux, transformation des pratiques dans un mouvement de résorption des spécificités, puis naturalisation, scandent le parcours théorique d’une population conçue comme exogène jusqu’à son assimilation. Ainsi, avant d’être présentée comme la classification la plus respectueuse des droits des populations immigrées, la catégorisation par la nationalité a constitué l’expression directe d’une normativité politique, le plus souvent perçue comme allant de soi dans le contexte de la tradition nationale française.
Le passage de la catégorie des étrangers à celle des immigrés opéré à la fin des années 80 ne répond qu’imparfaitement aux questions suscitées par les développements de l’ethnicisation des rapports sociaux. La circulation extensive de labels ethniques dans les rapports sociaux se traduit par une réduction significative des opportunités de mobilité sociale et d’accès aux biens et services pour les individus appartenant aux groupes dévalorisés en raison de l’imputation d’origines ethniques et raciales. Sa prise en compte pose un problème délicat aux sciences sociales. Est-il possible de produire de nouvelles formes de classement qui, tout en s’émancipant des catégories du national, ne reproduiraient pas mécaniquement celles du sens commun, en particulier lorsque c’est le rapport raciste qui produit les labels ?
Les différenciations sur des bases ethniques et raciales contredisent en apparence les visées du modèle français, égalitaire et universaliste. Mais leur prise en compte peut concourir à la lutte contre les inégalités et constituer un préalable à la réalisation de l’universalité. Dans cette perspective, la catégorisation ethnique et raciale participe de l’objectif légitime d’assurer l’égalité et devient un moyen utile de dépassement des barrières érigées par les rapports sociaux racistes. La stratégie de mobilisation circonstanciée, et transitoire, des catégories à l’origine de la rupture d’universalité peut apparaître paradoxale. Elle amplifie en effet les dynamiques d’ethnicisation qu’elle entend circonvenir. Mais l’option inverse, défendue par une certaine tradition du modèle d’intégration, consistant à promouvoir l’universalisme par l’invisibilisation des labels ethniques et raciaux produits par les rapports sociaux, a démontré ses effets d’occultation des discriminations.
Différentes méthodes de classification ont été adoptées dans plusieurs pays qui, pour certains avaient une tradition de catégorisation ethnique et raciale et pour d’autres – la Grande Bretagne essentiellement – l’ont inventée pour les besoins de la lutte contre les discriminations (Simon, 1997). La première méthode utilise des éléments « objectifs » extraits de la biographie des individus, en inférant par là que l’ascendance équivaut à une sorte « d’identification de référence »([[Identification, et non pas « identité » comme on le croit souvent. En effet, si l’enregistrement statistique peut prétendre codifier des identités, il capte en réalité la surface de représentation des individus.). Le lieu de naissance des parents – nativity – permet de restituer la filiation et la construction de la fameuse « seconde génération ». Subsistent néanmoins des limites à la méthode avec le (re)classement des unions mixtes. Comment définir les descendants d’union entre immigré-e-s et autochtones ? On retrouve là la question du métissage, centrale dans l’analyse des sociétés pluriculturelles et qui est traitée extrêmement différemment selon les contextes historiques et sociaux. Une première logique d’agrégation s’apparente à une préservation de la pureté du groupe majoritaire, suivant une théorie biologisante (transmission de traits somatiques) ou culturalisante (transmission de traits culturels) où le mélange dégrade la composition originelle. Mais l’agrégation peut également suivre une seconde logique qui prend le contre-pied de ces approches essentialistes et consiste à transcrire dans la statistique le système de hiérarchisation ethnico-raciale fonctionnant dans la société concernée. Dans cette deuxième logique de classement, les descendants d’unions dites mixtes sont classés dans le groupe exposé à la stigmatisation ou, pour reprendre une terminologie goffmanienne, le groupe discréditable. En ce sens, la règle de classification reproduit et confirme les logiques sociales.
Pour soutenir une continuité généalogique malgré les brassages, il faudrait étendre l’hypothèse d’une transmission prioritaire du caractère discrédité (qui décide du rattachement au groupe minoritaire) au-delà de la seconde génération. Cette hypothèse peut difficilement être soutenue en dehors de toute contextualisation des opérations de classements sociaux, dans la mesure où aucun critère d’identification, y compris la couleur de la peau ou le nom, ne fonctionne indépendamment du système de signification et de hiérarchisation en vigueur dans les mondes sociaux. En d’autres termes, la méthode « généalogique » perd toute signification lorsque l’arrivée des premières vagues migratoires remonte à plus de deux générations. Dans ce cas de figure, la filiation réelle des individus ne peut convenablement fournir d’indications sur leurs « origines ». Il devient nécessaire de passer à une définition contextuelle de l’origine, c’est-à-dire de faire référence à une auto-identification, combinant l’appartenance et l’assignation.
Suivant une logique de choix plus ou moins rationnel, les individus doivent se classer dans des rubriques « ethniques et raciales » dont ils considèrent qu’elles indiquent leurs origines. En dépit des apparences, l’auto-identification ne respecte pas l’autonomie de définition. Toute une série de filtres s’interposent entre l’énoncé brut de la situation de l’individu et le classement qu’il va finalement choisir. La consistance de l’image publique de son origine, le degré de stigmatisation qu’elle subit, sa propre identification à celle-ci, l’intérêt qu’il porte à l’expression de cette identité sont autant de critères qui vont le pousser à déclarer ou ne pas déclarer une origine. Plus encore, pour tous ceux qui peuvent revendiquer une multiplicité d’origines, le choix d’une ou deux d’entre elles fait intervenir une sorte de hiérarchisation où s’exprime une foule de déterminants, personnels ou sociaux. Le fait que ce soit l’individu qui se détermine ne laisse aucune possibilité d’intervenir sur le classement et laisse pendante la reconstitution des logiques présidant à son choix. La méthode est cohérente avec la problématique des rapports sociaux ethnicisés, puisque les effets de représentation, d’imposition et d’intériorisation de labels font partie intégrante des processus d’intégration. Plus encore, en promouvant une logique de choix, ce mode d’enregistrement favorise une théatralisation statistique, c’est à dire la projection dans les opérations de classification des conflits et rapports de concurrence entre minorités, et entre les minorités et la majorité.
Réinvestir et subvertir les catégories discriminatoires
Parce que les politiques de l’identité ont longtemps été menées dans le but de dominer, d’opprimer, d’exclure ou d’éradiquer des groupes construits comme inférieurs – et certaines sont encore d’actualité – la plupart des travaux s’attelant à déconstruire les classifications mettent en évidence les effets d’imposition par les dominants sur les dominés. Pourtant, si l’identification se construit dans des rapports d’inégalité et de domination, elle comporte également un potentiel de subversion qui relativise les déterminations attachées aux assignations catégorielles. Les luttes pour la reconnaissance ne doivent pas uniquement se concevoir sur le plan d’un accès symbolique à la représentation, mais s’inscrivent également dans des mouvements ayant pour objet le contrôle des moyens et formes de la redistribution comme l’a théorisé Nancy Fraser (2005). Au cœur des revendications à la reconnaissance figure la nécessité de requalifier des identités discréditées et donc, pour les minorisés, de se réapproprier les catégories forgées dans le rapport de domination pour en modifier le contenu et les signes.
La grammaire identitaire n’est sans doute pas extensible, mais les frontières peuvent être déplacées, en dépit du caractère ontologiquement stigmatisant de la catégorie. Le minoritaire n’est pas uniquement agi, subissant passivement les mécanismes d’imposition identitaire conduits par l’état ou le majoritaire et n’ayant comme alternative que le refus des identités prescrites. Or, l’effet de la position subalterne du minoritaire sur sa construction identitaire est inséparablement double : l’étiquetage social le pousse soit à reprendre l’identité stigmatisée pour se l’approprier et la requalifier en inversant le stigmate, selon le processus topique du « black is beautiful », avec le projet ultime de détacher l’image négative de la catégorie ; soit à l’inverse à rechercher l’assimilation au groupe au dominant ou du moins à son système de signes pour éviter d’être pris dans la dépréciation avec l’espoir de passer inaperçu et d’éviter les assignations identitaires et le renvoi aux origines. Dans le premier cas, l’effet pervers de la stratégie est bien documenté : l’investissement dans l’identité stigmatisée tend à renforcer les divisions instituées et sert, au moins dans un premier temps, les intérêts du groupe dominant. Cependant, les minoritaires poursuivant une stratégie d’inversion du stigmate gagnent sur deux points : ils rendent concret le système de hiérarchisation ethnico-racial ou sexué souvent masqué derrière l’édifice égalitaire formel, ce qui permet d’actualiser l’état réel de la stratification sociale et des modes d’accès aux droits et ressources et d’exercice du pouvoir dans les sociétés multiculturelles ; sur le moyen terme, ils construisent les conditions d’un dépassement de la logique identitaire en revenant sur les racines de l’étiquetage par l’appropriation de sa traduction. Celui-ci n’est plus le résultat d’une imposition, ipso facto il change de nature et perd de sa portée.
Il n’existe pas de consensus parmi la communauté scientifique et peu de travaux fournissent des éléments permettant d’envisager les « coûts et bénéfices » de la reconnaissance et de la banalisation des topiques ethniques et raciales. D’autant que les conséquences de la labelisation ou de l’invisibilisation diffèrent selon les contextes socio-nationaux. L’une des grandes réussites du modèle français d’intégration est d’avoir renforcé les conduites « d’hypercorrection sociale », amenant à accepter « la définition dominante de son identité » et à rechercher l’assimilation en développant « tout un travail de présentation de soi et de représentation » (Sayad, 1999, p.10). Il faudra sans doute attendre que monte la voix des minorités elles-mêmes et que nous sortions du soliloque dans lequel sont plongés chercheurs et politiques pour envisager plus concrètement les modalités de construction d’une société plus pluraliste. Aussi curieuse que pourrait paraître cette proposition, les statistiques, leur définition et leur utilisation, fournissent un bon moyen pour poser les problèmes.
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