Le champignon des renaissances post-catastrophe
Une littérature anthropologique récente multiplie les descriptions des manières d’habiter un monde détruit1. Les nouveaux héros de ces récits sont les figures d’une vulnérabilité et d’une insignifiance qui se transforme alors en force. L’ouvrage déjà célèbre d’Anna Lowenhaupt Tsing2 nous plonge ainsi dans une enquête consacrée à un champignon qui ne pousse que dans des forêts dévastées par les entreprises humaines. Autour de ce champignon, quantité de précaires, déracinés, migrants, vétérans et travailleurs sans statuts survivent et vivent de l’intérêt que les amateurs japonais portent à son arôme ainsi que des médiations qui se développent autour de cette demande. Des formes d’exploitation de la valeur se réorganisent à partir de ce qui se passe dans les ruines de la forêt et permettent l’élaboration de quelque chose de nouveau, un développement.
Le Champignon de la fin du monde insiste sur l’obsolescence du « progrès », mais il subsiste dans et autour de cet ouvrage un imaginaire tenace et optimiste de découverte et de reconquête de quelque chose qui échappe à la destruction, comme ce merveilleux champignon : un développement donc, fragile, inattendu, fondé sur ce que nous découvrons lorsque nous sommes contraints de ne plus compter sur les catégories d’un rapport au monde qui nous conduit à la violence et à l’extinction d’une quantité incommensurable d’êtres vivants. Des interdépendances non planifiées et non organisées, des possibilités complexes et fascinantes : le vivant qui cherche à vivre malgré tout. Ces enquêtes qui constituent enfin le vivant en phénomène intéressant – un vivant auquel nous avons perdu l’habitude de prêter attention et que nous distinguons beaucoup plus facilement dans les ruines3 – nous mettent en contact avec ce qui avait toujours existé, mais sans attirer l’attention de ceux qui dominent d’une manière ou d’une autre, dans la politique, la finance, ou les institutions du savoir sur la nature et sur la société. Quantité d’êtres – des personnes, des populations, mais aussi bien évidemment des créatures vivantes – ont vécu et vivent des situations de très grande précarité ou de désastres. Elles ne comptent pas, sont invisibles, inaudibles. Les catastrophes elles-mêmes n’ont parfois pas même laissé de traces4.
Non seulement la fin du monde semble nous échapper puisque nous perdons la maîtrise imaginaire de la possibilité même que tout soit détruit de manière volontaire5, mais des fins du monde, bien réelles quoique situées, ont déjà été vécues par des peuples6 dont au moins certains sont toujours vivants, même si ceux qui ont entièrement disparu ne peuvent pas même exister à l’état d’absents qui manquent (ils sont absents, voilà tout). Le génocide a fait vivre la fin du monde à une partie importante de la population européenne. Les Haidas et les Kwakwaka’wakw de la côte Nord-Ouest du Canada avaient pratiquement disparu en tant que peuple avant la réappropriation de leur culture (territoire, langue, histoire) par des activistes, artistes ou intellectuels autochtones. La réappropriation (reclaim) est d’ailleurs un concept féministe précisément forgé pour traduire des phénomènes de reprise : la ré-appropriation a été une manière d’en finir avec toute idée de « reconquête » ou de réussite, qui rattachait les invisibles aux langages et à la vision de dominants.
Du charme au trouble
J’ai été et je suis toujours fascinée par ces enquêtes et ces textes, fourmillants de paroles nouvelles et lestées d’expériences, qui éclairent les manières inédites de vivre la commune condition précaire et l’interdépendance consciente de ceux qui se savent vulnérables. Elles rendent presque déjà obsolète un pessimisme radical, qui serait encore l’affirmation d’un pouvoir lié à « l’ancien monde ». Pourtant, quelque chose dans ces textes, ou dans les réceptions de ces textes, me trouble profondément et me fait même revisiter l’excitation joyeuse que j’ai pu éprouver en lisant Donna Haraway ou Vinciane Despret. Il me semble suspect que nous soyons si aisément enthousiasmés par les nouveaux imaginaires que ces auteurs s’efforcent d’ouvrir à partir des enquêtes. La réception de ces ouvrages, et notamment celui d’Anna. Tsing, est en effet exagérément optimiste, de l’avis même de leurs auteures7. Il nous faut questionner cette tendance à l’optimisme. Comment est-il possible que l’attrait pour ces textes soit finalement si indolore et qu’ils trouvent leur place si facilement et si spectaculairement dans les institutions académiques et culturelles8, lesquelles ont pourtant été si défaillantes à prendre en compte le vivant, la vulnérabilité, et les interdépendances ?
Quantité de paroles continuent d’ailleurs de ne pas compter, puisque les filtres académiques qui assurent l’évaluation et la validation, de même que les statuts qui garantissent l’autorité, restent inchangés. La conversion s’opère plus aisément par l’attention portée à ce qui vient de loin, d’ailleurs, et qui passe par le filtre des institutions prestigieuses9. Il est vrai cependant que ces travaux arrivent dans un contexte préparé à ces ouvertures par des expériences discrètes, mais denses et continues : d’une part, les nombreuses expériences de contact entre pratiques militantes et enquêtes en sciences sociales et, d’autre part, les rencontres, au cours des enquêtes, entre les chercheur.e.s et des personnes qui s’efforcent de faire au mieux, des publics de la culture et des musées dans le cas de mes propres enquêtes. Même si ces expériences et ces contacts ont tardé à se déployer, dans la mesure où ils ne trouvaient pas place dans les cadres théoriques et les concepts existants, ils acquièrent une vie, une force qui favorise en retour l’adoption des textes relatant les enquêtes lointaines des représentants de l’anthropologie des mondes fragiles.
Cependant, quelque chose gêne dans la préface et le texte d’un ouvrage comme celui d’Anna Tsing, comme dans les textes des théoriciens de l’entraide en temps d’effondrement10. Il y a danger, à nouveau, d’une sorte de réconciliation rapide avec un état des choses qui est racheté par la beauté de ce qui peut y survivre, et danger de confondre le renouveau d’une conscience joyeuse du vivant avec l’illusion qu’il y aurait là promesse de nouveauté heureuse pour tous, dans un monde commun possible. Ce charme de la découverte ou de la redécouverte de ce qui semble soudain nouveau, du simple fait que nous nous y intéressons enfin, est dangereux. Il nous dispense de faire le travail d’embarquer dans l’enquête, non seulement ce que nous avons récupéré grâce à ce que la destruction nous laisse voir enfin (comme des portions du ciel et des plantes jusqu’ici invisibles, entre les ruines), mais aussi les absents et les traces des pertes irrémédiables. Cela nous tend le piège de maintenir indemne, chez leur destinataire, un état non questionné : l’état de celui qui est toujours plus sensible à la nouveauté qu’à la perte, qui n’est pas affecté par les désastres, qui ne partage pas la privation d’expérience directe de ceux qui sont coupés d’un monde perdu dont le deuil est impossible. Nous courons le risque de nous dispenser de partager le fardeau de la mémoire des disparitions ; ce faisant, nous risquons, encore et toujours, d’occuper les meilleures places pour dire ce monde dévasté à partir d’une priorité donnée à ce qui se passe et ce qui se crée, ce qui émerge, ce qui se développe, ce qui ressemble encore et toujours à la nouveauté.
Le souvenir des absences
et l’inquiétude devant la nouveauté
Cette inquiétude que je ressens à la lecture de ces textes provient, me semble-t-il, de ce qu’ils semblent proposer de mettre à distance – à savoir, non pas ce qui ne comptait pas auparavant (tout au contraire, cette distance-là est abolie et les chercheur.e.s se situent dans les agencements et les trajectoires qu’ils et elles décrivent), mais le jugement moral et politique qui a tant compté dans les luttes. Ce jugement moral et politique manquant distingue les chercheurs d’autres enquêteurs et expérimentateurs, par exemple les anarchistes, chez qui la mémoire constamment réactivée des luttes, échecs et sacrifices entretient, comme l’a signalé Enzo Traverso, une mélancolie structurelle. Cette mélancolie est un mode d’être et un moteur pour construire de nouveaux avenirs dans lesquels les disparus sont embarqués et prennent place : les morts sont gardés vivants par les vivants qui ont fait place aux morts.
Il me semble que dans la perspective souvent proposée par l’anthropologie des mondes abîmés, il s’agit avant tout de se rendre sensible à ce qui est, et d’entretenir et partager sans cesse des potentialités créatrices par la récupération et la création de récits énoncés du point de vue des vivants précaires, en les présentant comme intéressants. C’est le moyen, pour Donna Haraway, pour Tim Ingold, de s’occuper pleinement de la question : comment vivre ? Éviter le jugement permet de ne pas décider d’avance ce qui compte ou pas et de ne pas bloquer les récits. Mais ces récits sont limités à la vision de ce qui est ou de ce qui peut être. Dans les récits fascinants d’Anna Tsing, nous abandonnons ainsi tous les récits qui auront été rendus possibles par le Pin Ponderosa, disparu des forêts d’Oregon avec son cortège de créatures dépendantes. Nous abandonnons aussi les récits des existences détruites qui ont abouti à la population des cueilleurs.
Comment rendre sensible, dans la perspective d’une anthropologie des mondes abîmés, non seulement la responsabilité, mais aussi le désir d’intégrer les nécessaires et lourds récits des absences et des pertes, et comment maintenir la colère, la tristesse, et donc le jugement – et pas uniquement la joie et l’excitation pour ce qui advient, qui sont quant à elles étrangement plus compatibles avec la raison et le détachement. Comme si joie et excitation relevaient d’une confiance vitaliste et d’une libido sciendi acceptable, hors toute appréciation de ce qui est observé.
La nouvelle littérature anthropologique mérite donc qu’on y introduise des éléments qui perturbent le jeu, pas si enchevêtré que cela, des émergences, des agencements et des intérêts observables dans un monde abîmé.
Le premier élément me semble être la place laissée à la tristesse, la colère, l’inquiétude, contre un enthousiasme intellectuel sereinement amoral. Nous sommes exagérément sensibles à la nouveauté et pas assez à une réelle pluralité des formes d’expression. La beauté des enquêtes et des récits nourrit un rapport esthétique au monde dont nous devons nous demander s’il ne reconduit pas le détachement et donc l’insensibilité dénoncés par les subalternisés11.
La littérature anthropologique devrait donc être discutée en même temps que d’autres récits. Sans quoi nous risquons, encore et toujours, d’occuper les meilleures places pour dire ce monde dévasté à partir d’une priorité donnée à ce qui émerge et qui se traduit par la reconstitution d’une avant-garde, située exactement aux mêmes places que l’avant-garde antérieurement impliquée dans l’aveuglement qui abîmé nos milieux.
Écrire avec les spectres
Un certain nombre de travaux, d’œuvres ou de situations m’ont amenée personnellement à ressentir le besoin de la vulnérabilité créatrice et de l’impossibilité assumée de partager la perte et l’absence, comme justice essentielle et condition même de notre commune humanité. Aucun ne se situe résolument dans les sciences humaines et sociales.
Il me semble en effet que nous devons rendre compte non seulement de notre capacité à produire des récits, mais de nos pratiques de lecture des textes non académiques, qui peuvent avoir été écrits depuis longtemps et qu’il n’y a pas lieu de transformer pour les intégrer aux nouveaux récits académiques. Les sciences sociales peuvent écouter les voix différentes. Elles peuvent aussi, en même temps, reconnaître que d’autres récits que les leurs ont déjà été produits et diffusés hors champ académique. Pendant que les chercheur.e.s se désintéressaient des manières de vivre et survivre dans un monde abîmé, quantité de témoins s’y consacraient enquêtant et racontant depuis des situations où ont été déjà vécus des effondrements.
J’évoquerai donc brièvement un autre type de textes, ceux W.G. Sebald, écrivain allemand né en 1944, décédé en 2001 en Angleterre où il vivait et enseignait depuis 1966. Ses ouvrages se présentent comme la méditation d’un narrateur qui se rend dans des lieux dont il se rappelle les états précédents, qu’il a pu connaître ou bien qui remontent à d’autres périodes, historiques ou pré-historiques, connues à travers des textes et des images mélangés à ses propres souvenirs. Ses textes sont émaillés de documents, fragments d’archives improbables, repérés dans des journaux locaux, exhumés dans les bibliothèques, et que le narrateur consulte au cours de ses excursions. Sebald ne cesse d’établir des continuités narratives et affectives entre ses souvenirs, ceux des narrateurs, ceux de personnes rencontrées par ces narrateurs, ceux qui sont consignés dans des archives souvent précaires ou dans les archives géo-écologiques que constituent les villes et surtout les paysages qu’il arpente, toujours menacés de perdre leurs propres traces. Dans Les anneaux de Saturne (1995) il rend compte de la manière dont les interventions combinées de la mer, du vent, des hommes marquent le paysage de la côte Nord Est de l’Angleterre de quantités de spectres : pêcheurs et des poissons autrefois si nombreux, villes prospères désormais écroulées avec les falaises qui les supportaient, activités fourmillantes qui se sont retirées comme une lente marée, laissant derrière elle un espace-temps à la fois vacant et chargé des signes que seul le promeneur continue de voir dans un mouvement du corps et des yeux qui ne connaît jamais de relâche. Il a été reproché à Sebald une vision des ruines moralisante et conservatrice : Penski l’oppose à Benjamin12. Sebald ne ferait que voir un travail de la nature qui se vengerait de la vanité humaine. Penski critique durement cette dimension morale. Sebald ne verrait que ce qu’il veut voir, les ruines seraient des contenants vides qui réfléchiraient les intentions morales de l’observateur, exprimées dans une « suite prédéterminée de correspondances affectives et cognitives qui permettent de projeter les signes d’une histoire de la futilité des efforts humains pour vivre ensemble décemment, sans devenir des monstres » (p. 84). Or, ce que Penski nomme la « suite pré-déterminée des correspondances affectives et cognitives » est le travail même de la nature et de la culture dans le corps de l’observateur. Ce travail est invisible à qui ne considère pas le récit comme l’expérience même de l’enquête, qui est chez Sebald une manière de vivre corps et âme le déplacement et la réflexion dans un monde en ruines. Il éveille dans ce nomadisme inlassable non seulement les savoirs multiples à propos des lieux et savoirs de la nature et de l’histoire des hommes, mais aussi des présences, des atmosphères et des sentiments déposés dans ces savoirs. Sebald rejoint la figure du passeur chez le cinéaste Tarkovski, pris lui aussi corps et âme par le devoir d’arpenter les paysages de la dévastation ou de l’exil et d’y promener les savoirs, eux-mêmes exilés des corps disparus.
La critique du caractère conservateur et moral du rapport nature/culture chez Sebald n’est pas sans rappeler les réactions à l’éthique du care. Il a fallu réattribuer cette éthique du care aux féministes pour redresser une lecture critique l’attribuant à la morale religieuse. Il existe une hantise, chez les intellectuels et les savants, de tout ce qui peut bloquer l’expansion d’une pensée de la découverte ou de la redécouverte13. Or dans l’éthique du care comme chez Sebald, l’attention pour les attachements et les arrachements apparait « conservatrice » comme le féminin est apparu longtemps « conservateur » dans son indifférence radicale au progrès ou à l’originalité esthétique ou cognitive.
L’écriture de Sebald fait enquête, elle est la description continue d’une activité indissociablement intellectuelle et biologique, dans un milieu culturel et naturel. La culture y est un humus riche et précaire, qui permet de parcourir et réactiver en permanence des choses dites, vues, écrites, racontées, chantées, proposées, dans des formes ou des objets (livres, archives, tableaux, bruit du vent, lumière, paysage, photographie, etc.) et dans les gouffres. C’est ce parcours incessant qui maintient en vie et renouvelle la culture/nature. Celle-ci se nourrit de ce qui est mort et de ce qui émerge. Il n’y a aucune raison d’oublier, aucune raison de ne pas se remémorer ; il n’y a aucune raison non plus de ne pas rendre compte de ce que provoque le déplacement chez l’écrivain et le lecteur. Ce qui s’éprouve à la lecture de Sebald, c’est un art d’habiter et d’honorer le tombeau de mondes perdus, des mondes travaillés par les transformations de la nature et des entreprises humaines. Ses romans manifestent une conscience directe et vivante de l’érosion générale des milieux et des récits, et ils témoignent de l’effort harassant d’habiter et vivre ces lieux fragiles, non sans échos avec les réflexions actuelles14.
1 Je remercie Alexandre Monnin : ce sont des échanges avec lui qui ont inspiré ce texte.
2 Anna Lowenhaupt Tsing, Le champignon de la fin du monde, Paris, La Découverte, 2015.
3 Voir Antoine Volodine, les Anges Mineurs, Paris, Seuil, 1999.
4 Dans Cent ans de Solitude, Gabriel Garcia Marquez évoque la dissipation totale d’un massacre de plusieurs milliers de personnes (Macondo). Cet épisode est restitué de telle manière qu’il continue de sembler inimaginable, et donc intégré à la trame fantastique de l’œuvre, alors même que la mémoire de quantité de massacres, comme celle des Malgaches en 1947, s’est pareillement évaporée de notre histoire.
5 Notre époque contraste ainsi avec la décennie 1970, pendant laquelle il était pratiquement acquis que l’homme avait les moyens, avec la bombe atomique, d’anéantir toute vie en cas de guerre nucléaire.
6 Voir Nathan Wachtel, La vision des vaincus – les indiens du Pérou devant la conquête espagnole. Paris, Gallimard, 1971 – Ernesto de Martino, La fin du monde, essai sur les apocalypses culturelles. Texte traduit et annoté sous la direction de Giordana Charuty, Daniel Fabre et Marcello Massenzio, Paris, éditions de l’EHESS
7 Dans un entretien au journal Libération, Anne Tsing écrit ainsi « l’histoire de ces champignons qui parviennent à renaître sur des sols abîmés n’est pas une métaphore pour dire que pour nous aussi, à la fin tout ira bien. Certains lecteurs ont interprété mon livre comme une promesse d’espoir. Ce n’était pas mon but. Je voulais montrer que dès lors que nous ne pouvons plus croire à l’optimisme porté par le grand récit du progrès, le mieux que l’on puisse faire, c’est espérer des lieux viables et se débrouiller pour vivre. Face à l’optimisme de ces lecteurs, et pour montrer que les matsutakes ne représentent pas le seul visage de la vie dans les ruines, je me suis lancée dans une nouvelle recherche, cette fois sur les champignons pathogènes qui causent des maladies chez les plantes et les animaux ». (Libération 14 juin 2019, entretien de Sonya Faure « Anne Tsing : Fabriquer des mondes n’est pas réservé aux humains », www.liberation.fr/auteur/2014-sonya-faure.
8 C’est le cas limite de David Abram, Comment la terre s’est tue, Paris, La Découverte, 1999.
9 C’est le cas d’une partie subaltern studies et des studies en général –avec le passage de l’art africain par les grandes collections.
10 Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, Entraide. L’autre loi de la jungle, Paris, Les Liens qui Libèrent, 2018.
11 James Baldwin, dans le texte adapté au cinéma par Raoul Peck pour le film « I am not your negro » (2017), évoque l’atrophie morale des américains blancs. Il la met en relation avec séparation entre vie privée (les attachements familiaux, amicaux) et vie professionnelle. Cette séparation, mortifère, est également remise en cause dans l’éthique du care. Voir Carol Gilligan (trad. Annick Kwiatek et Vanessa Nurock, préf. Sandra Laugier et Patricia Paperman), Une Voix différente : Pour une éthique du care, Flammarion, 2008.
12 Max Penski Three Kinds of Ruin: Heidegger, Benjamin, Sebald. Poligrafi, 2011.
13 Dans ce même article, l’attrait de la pensée de Benjamin pour Penski réside précisément dans la sensibilité à la ruine dans une ville non ruinée comme Paris, c’est à la dire dans une découverte qui marque la subtilité d’une pensée nouvelle, stimulée par un art de la dialectique, qui empêche peut-être Penski de voir d’autres formes que la dialectique.
14 « Notre propagation sur terre passe par la carbonisation des espèces végétales supérieures et, d’une manière générale, par l’incessante combustion de toutes substances combustibles. De la première lampe-tempête jusqu’aux réverbères du xviie siècle, et de la lueur des réverbères jusqu’au blême éclat des lampadaires qui éclairent les autoroutes belges, tout est combustion, et la combustion est le principe intime de tout objet fabriqué par nous. La confection d’un hameçon, la fabrication d’une tasse de porcelaine et la production d’une émission de télévision reposent au bout du compte sur le même processus de combustion. Les machines conçue par nous ont, comme nos corps et comme notre nostalgie, un cœur qui se consume lentement. Toute la civilisation humaine n’a jamais été rien d’autre qu’un phénomène d’ignition plus intense d’une heure à l’autre et dont personne ne sait jusqu’où il peut croître et ni à partir de quand il commencera à décliner. », Les anneaux de Saturne, Folio, Gallimard.
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