Archives par mot-clé : archéologie

Le tumulte plébéien Ou la part du dés-ordre en politique, par et

Le tumulte plébéien
Ou la part du dés-ordre en politique
L’interpellation plébéienne est un concept visant à nommer la force politique des soulèvements populaires et des actions directes spontanées. En modifiant le concept althussérien d’interpellation et en le combinant à celui d’expérience plébéienne (Breaugh, 2007), il s’agit de rendre compte de l’auto-interpellation des « sans-part » (Rancière, 1990) par laquelle ils se donnent leurs propres conditions de possibilité dans des actions collectives. Le propre de ces actions est précisément de surgir en dehors des formes ritualisées de constitution de l’espace public. Elles sont intraitables dans ce qu’elles refusent toute catégorisation mais également dans ce qu’elles débordent toute représentation de « vivre-ensemble » de l’ordre politique. Cette forme « sauvage » d’interpellation se manifeste dans des moments de révolte ou de « sécession », d’interruption du cours normal de la reproduction du social. La plèbe doit être saisie pour ce qu’elle est, dans le tumulte vif de sa manifestation.

The plebeian turmoil
Or the share of dis-order in politics
The concept “plebeian interpellation” describes the political strength of popular uprisings and spontaneous direct actions. By modifying the Althusserian concept of “interpellation” and combining it with that of “plebeian experience” (Breaugh, 2007), we wish to offer an account of the self-affirmation of the “those without part” (Rancière, 1990) by which they give themselves their own conditions of possibility through collective action. Such actions arise outside the ritualized forms of the constitution of public space. At the same time, they arise beyond any representation of the political order. This untamed form of interpellation occurs in the context of rebellion or “secessions” that are as many interruptions of the normal course of social reproduction. Yet the plebs must be understood for what it is, in the great tumult of its manifestation.

Défaire l’image De l’art contemporain, par

À mi-chemin entre l’art et la philosophie, Défaire l’image esthétique de l’art est appréhendé, non pas « d’après » mais après Deleuze et Guattari, sous l’idée de régime, d’agencement ou de « pensée diagrammatique ». Indissociable du déplacement de l’analyse à partir des œuvres et des pratiques (de création et de réception), la recherche donne lieu à une multiplicité d’essais proposant autant d’expériences de pensée par l’art contemporain. La Pensée-Matisse et la Pensée-Duchamp sont ainsi mises en tension d’un champ de forces « rechargé », depuis les années 1960, par les options micropolitiques dont relève la problématisation critique et clinique de l’art. Le mode d’emploi passe par Daniel Buren, Gordon Matta-Clark et Günter Brus, avec la lignée brésilienne de Hélio Oiticica à Ernesto Neto.

Undoing the Image
Of Contemporary Art
Halfway between art and philosophy, this attempt to Undo the aesthetic image of art is less “drawn from” than “taken after” Deleuze and Guattari, in terms of regimes, assemblages and diagrams. Linked to a displacement of works and practices (of creation and reception), this research provides a multiplicity of thought-experiences generated by and through contemporary art. Matisse-thinking and Duchamp-thinking constitute a field of forces recharged, from the 1960s on, with micropolitical options in critical and clinical problematizations of art. A User’s Manual would include Daniel Buren, Gordon Matta-Clark and Günter Brus, along with a Brazilian line of artists going from Hélio Oiticica to Ernesto Neto.

L’image théorique ou l’artiste face à l’Histoire, par

Ce texte entend démontrer la dimension théorique de l’œuvre d’art en prenant appui sur le Butcher boys de Jane Alexander. L’indétermination formelle que suscite cette œuvre est mise en rapport avec l’ambivalence telle qu’envisagée par Homi Bhabha dans la théorie déconstructionniste. Après avoir montré l’influence du poststructuralisme sur le postcolonialisme, l’auteur s’appuie sur l’hypothèse selon laquelle la problématique de l’ambivalence et la critique de la temporalité sont les deux points d’ancrage qui placent Butcher boys au centre du discours deconstructionniste postcolonial. C’est ainsi que l’œuvre est analysée par rapport au Temps, à la Mémoire et à l’Histoire et mise en relation avec les événements historiques déterminants de l’Afrique du Sud. L’auteur dégage ce qu’il nomme une corporéité de la mémoire comme support d’une écriture de l’histoire.

Theoretical image or the Artist facing history
This paper attempts to demonstrate the theoretical nature of artwork from Jane Alexander’s Butcher boys. The formal indeterminacy of this artwork is related to the ambivalence as mentioned by Homi Bhabha about deconstructionist theory. The author underlines the influence of poststructuralist theory on postcolonial discourse and considers the hypothesis that the problem of ambivalence and the critic of temporality are the main ideas that get Butcher boys in the center of postcolonial deconstructionism. From this point of view, the artwork is analyzed in relation to Time, Memory and History in view of South Africa’s historical events. The author demonstrates what he names the corporeity of memory as the support of making history.

Historiographie de l’art, depuis l’Afrique, par et

Depuis la fin des années 1980, la reconnaissance croissante, sur les scènes « globales » de l’art, d’artistes contemporains d’origine africaine, longtemps négligés, a largement été coupée – en France particulièrement – de la réception de ressources discursives et pensées théoriques sur l’art, venues d’Afrique. Cet article s’intéresse à l’émergence dans les années 1990, d’un « nouveau discours africain » porté par une génération de commissaires, historiens et théoriciens de l’art, qui aura choisi, en premier lieu, de réévaluer les modernités artistiques africaines. Il met en relief la géographie paradoxale de cet « espace discursif africain », où plusieurs spatialités se superposent (celles de discours très mobiles – portés par des revues d’histoire et théorie de l’art, plateformes curatoriales ou éducationnelles nomades, basées dans les métropoles de la diaspora ou implantées sur le continent le temps d’une biennale – et de revues, institutions académiques, centres d’art, musées continentaux plus enracinés).

Art Historiographies from Africa
Since the late 1980s, the growing recognition, on the global art scene, of long neglected contemporary artists of African origin went hand in hand with an exaltation of multiculturalism, erasing the borders which divide the art world. The reception granted to these artists, in particular in France, was severed from the reception of the theoretical resources which reframed art from an African perspective. This article introduces a wider project of translation of historiographic discourses and African views on art, documenting the emergence, in the 1990s, of a “New African discourse” on art, carried by a generation of curators, historians and theorists who chose to reevaluate the various trends of modern African art.

Contre-fictions de soi : résister à la modélisation et à la modulation de la vie psychique, par

New Babylon ou le monde des communs, par

Dans les objets insolites de Constant ou dans l’oeuvre architecturale d’Aldo Van Eyck, la modernité consiste à se situer sur la frontière entre le public et le privé, en multipliant les seuils, les espaces où on s’attarde, et surtout en grimpant en hauteur sur des pylônes pour déployer une nouvelle géographie. On peut enfin habiter le monde, devenir un homo ludens, jouissant de tous les mètres carrés de la ville et les transformant par son pouvoir créatif. Mais l’action directe des mouvements des années 60 a mis fin au rêve de la New Babylon en pratiquant l’appropriation immédiate. New Moloch reproduit le capitalisme sur toute la planète, établit partout sa hiérarchie de points de vente. New Babylon articulait espace physique et espace de communication, sans centre, multipliait les points de fuite grâce à la dérive situationniste, et produisait de beaux objets.

New Babylon or the world of common

In Constant’s unusual objects or in Aldo Van Eyck’s architectural works, Modernity consisted in riding the borderline between the public and the private, in multiplying thresholds and spaces for wandering. The world could be inhabited by a homo ludens, exploring every square foot of the city and transforming it according to his creative power. Direct action by the movements of the 1960s has put an end to this dream of a New Babylon by practicing immediate appropriation. New Moloch reproduces capitalism all over the planet, reproducing everywhere its hierarchy of commercial outlets. New Babylon articulated physical spaces with communicative spaces, in a centerless multiplication of lines of flight, along its situationist drifts, producing beautiful objects.

L’enthousiasme, ou le cinéma à venir, par

Enthusiasm, projet des artistes Neil Cummings et Marysia Lewandowksa initié en 2002, recense des centaines de films réalisés par des cinéastes amateurs polonais entre les années 1950 et la fin des années 1980. À partir de ces archives filmiques inédites, les deux artistes élaborent un réseau, ou une stratification, de récits : un certain mode collectif de production et de diffusion cinématographique, une visualisation du socialisme vécue du dedans, ainsi que la transmission (nécessairement indirecte) d’un enthousiasme historico-politique. Cet article tente de mettre en évidence le lien – sensible dans les expositions d’Enthusiasm en Europe et en Amérique – entre un tel enthousiasme et une conception du cinéma comme vestige historique en perpétuel devenir, depuis l’avant-garde russe des années 1920 jusqu’à certaines productions artistiques récentes (celles de Lewandowska/Cummings, mais aussi de Pierre Huyghe et Douglas Gordon) en passant par les œuvres de Jean-Luc Godard et Chris Marker.

Enthusiasm, a project launched in 2002 by the artists Neil Cummings and Marysia Lewandowska, inventories hundreds of films created by amateur filmmakers in Poland from the 1960s to the late 1980s. On the basis of this previously unavailable film archive, the two artists have elaborated a network or stratification of narratives – concerning a certain mode of collective film production and distribution, a visualization of socialism as lived from within, and a (necessarily indirect) transmission of historical-political enthusiasm. This essay attempts to highlight the link – palpable in the exhibitions of the project both in Europe and America – between such an enthusiasm and a conception of cinema as a historical vestige in a process of perpetual becoming, from the Russian avant-garde of the 1920s all the way to certain recent artistic productions by Lewandowska/Cummings as well as Pierre Huyghe or Douglas Gordon, via the filmic works of Jean-Luc Godard and Chris Marker.

Multitudes