Dossier : les travailleurs sociaux

Du ririfi dans la psy

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Le 27 janvier 1997, un conflit débutait à l’hôpital psychiatrique de Maison Blanche à Neuilly-sur-Marne (93) pour s’opposer au projet de fermeture du site en 2001. Odyssée de l’espace, tout en assurant les soins, les personnels firent durant deux mois des barrages filtrants, des assemblées générales et des actions quasi quotidiennes avec, à deux reprises, la séquestration du directeur Mordelet et de son adjoint Bâtard dans leur « château ». La majorité des 1850 salariés s’opposant ainsi aux restrictions budgétaires, aux premiers licenciements déguisés et au redéploiement d’un certain nombre de lits sur Paris, préfigurant le démantèlement de Maison Blanche.
Cet hôpital représente 625 lits de psychiatrie et 114 lits médicalisés de long séjour, des structures de soins à Paris suivant chaque année 12 000 patients du nord-est de Paris. Pour les pouvoirs publics, la restructuration avait pour but de faire des économies mais aussi de mieux répondre aux besoins de la population, pour l’intersyndicale unitaire (CGT, CFDT, CFTC, FO) : « le projet vise uniquement à réduire le nombre de lits de façon considérable, sans développer les structures nécessaires à une hospitalisation publique de qualité à Paris et à Neuilly-sur-Marne. »
Courant après un impossible dialogue et des faux-médiateurs du ministère Juppé qui jouaient la montre et les mots entre les catégories de personnels et les syndicats, ce mouvement social fut la pierre angulaire sur laquelle ne s’appuya pas le mouvement des internes et des médecins. L’ensemble fut le fondement souterrain qui contribua à balayer le gouvernement Juppé, geler la droite et redécongeler la gauche. Quand la logique du pognon conduit les médecins à renier le serment d’Hippocrate, les lignes des factures deviennent trop lisibles.
En ce début d’hiver 97, tout est en l’état, la marmite bout. L’enjeu est clair : médicamentiser les dysfonctionnements psychologiques, y compris ceux des licenciés et des chômeurs, en réduisant considérablement les personnels soignants et leurs connaissances humaines ou redéployer la santé publique dans le tissu urbain en formant et connectant un ensemble de professionnels tout en créant de vrais emplois nouveaux.
La santé est le noeud central du corps social (avec l’éducation). Plus que tout autre secteur, c’est la santé qui a la capacité d’organiser d’authentiques États généraux pour définir quels sont les besoins de la population ; en défendant les principes fondateurs d’une république vivante, où les corps sociaux reconstitués représentent l’autorité et la connaissance et donnent des mandats précis aux politiques pour exécuter u pouvoir temporaire.
Un documentaire audiovisuel sur les enjeux du redéploiement de la psychiatrie en cours de réalisation apportera sa contribution pour éclairer le sujet.