Icônes 31

La figure du pirate ou la désobéissance civile

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Féminisme et art contemporain, vers des perméabilités réciproques.

Women on Waves est une association féministe qui, à nos yeux, relève d’un nouveau type de militantisme[1]. En effet, celle-ci associe actions directes, production de discours et d’objets artistiques. Pour saisir toute la portée de leur enjeu politique, il nous paraît nécessaire de nous concentrer non pas sur la production d’objets, en analysant leur éventuelle portée artistique, mais sur les modalités de cette production faisant intervenir à la fois l’art contemporain et l’activisme féministe.

Cette perspective critique nous conduira à comprendre comment Women on Waves infiltre le champ de l’art et détourne les modalités de reconnaissance de l’art (œuvre, exposition, marché de l’art, etc.) pour les besoins d’une stratégie de désobéissance civile organisée qui pense avant tout la portée éthique de son geste militant au regard de l’Autre.

Nous verrons comment la singularité de leur action, qui n’est pensée et réalisée qu’à partir de la demande expresse de celles et ceux qui en ont besoin, opère une césure critique essentielle et offre une alternative militante au concept du droit d’ingérence et ses usages multiples, tels que nous les observons dans la politique internationale.

Nous transposerons enfin notre analyse de la portée éthique de l’activisme des Women on Waves au contexte de notre politique nationale. Nous réaliserons combien la pertinence de leur agir militant nous permet d’élargir notre réflexion féministe et artistique à la confiscation problématique de la prise de parole des sujets différents telle qu’elle apparaît dans la rhétorique de Nicolas Sarkozy, notamment dans sa déclaration sur le droit à la différence des hétérosexuels, à propos du mariage, au moment de la campagne présidentielle.

Women on Waves est une association à but non lucratif financée par des fonds privés, fondée en 1999 aux Pays-Bas par une femme médecin, Rebecca Gomperts. Cette association regroupe des personnes aux compétences multiples (des médecins, des gynécologues, des juristes, une ancienne agent du FBI, des spécialistes en géopolitique, des gestionnaires, etc.) et propose de mettre à disposition des femmes des moyens d’information, de contraception et d’interruption de grossesse lorsque celles-ci en émettent le souhait mais en sont empêchées par la législation en vigueur dans leur pays[2]. Women on Waves a choisi, nous le soulignons, de n’agir qu’à la demande d’associations féministes locales relayant les requêtes de femmes qui, en choisissant l’intervention volontaire de grossesse (IVG), se retrouvent en position d’illégalité. Pour contourner la législation en vigueur dans les pays criminalisant l’avortement, il est apparu que le seul espace à occuper en toute légalité était celui des eaux internationales, dans lesquelles un pavillon ne dépend que de la législation de son propre pays : par exemple, l’IVG n’étant pas criminalisée aux Pays-Bas, un pavillon hollandais peut la pratiquer librement dans les eaux internationales.

L’activité de l’association a donc été pensée autour de l’idée d’un bateau accueillant les femmes qui désirent s’informer, consulter un médecin gynécologue et recourir à une IVG. Cependant, l’acquisition d’un navire et son entretien auraient entraîné des dépenses trop importantes, l’association féministe a donc décidé de construire un bloc opératoire portatif capable d’être transposé d’un bateau à un autre pour les besoins de chaque opération. Il est rapidement apparu qu’un artiste pouvait prendre en charge la conception et la réalisation de ce caisson médical mobile, ce qui a permis à l’association de bénéficier d’un autre type de subvention.

Féminisme et art : vers une éthique de l’action

L’Atelier van Lieshout s’est chargé de penser et de réaliser cette clinique portative, nommée l’A-Portable (diminutif d’Abortion-Portable) et financée à hauteur de 35 000 euros par la Fondation Mondrian pour l’art contemporain (Amsterdam). Nous soulignons que c’est donc une fondation privée pour l’art contemporain qui a permis l’existence de la clinique permettant de pratiquer les avortements en eaux internationales. Cette première collaboration entre le champ de l’art contemporain et l’association Women on Waves s’est prolongée en 2003, pendant la Biennale de Thessalonique.

L’artiste éditeur Willem Velthoven, représentant les Pays-Bas, décide de créer une unité de production et de diffusion d’objets destinés à porter le message de l’association Women on Waves. Reprenant l’idée d’un objet artistique multiple, sa structure d’édition Mediamatic fait produire des T-shirts, robes et débardeurs portant le slogan « I Had an Abortion » qu’il rend disponibles à la vente dans ce qu’il appelle le Mediamatic Supermarket, sous l’égide d’un projet général appelé Art Communication Tool (ACT). L’idée du projet est de donner un corps et une existence à toutes les femmes qui ont eu recours à une IVG. Les vêtements sont en vente pendant toute la durée de la biennale et l’association Women on Waves est invitée à diffuser son travail autour de tables rondes et de tables de presse. De plus, grâce à des dispositifs propres à l’exposition d’œuvres, tels la vidéoprojection, le mural de photographies ou l’installation environnementale, réalisés autour de l’activité et des membres de l’association, cette collaboration entre une association féministe et un projet artistique a pour finalité la présentation des stratégies militantes de Women on Waves dans un contexte autre que celui de son action.

Ce n’est dès lors plus l’art contemporain qui emprunte la forme de l’expression militante, mais bien le militantisme qui infiltre l’art contemporain et utilise sa potentialité à véhiculer de la communication, à faire image et surtout à lever des fonds privés. Ce passage à l’acte revient à réaliser une subversion exemplaire des modes et traditions du champ de l’art lui-même, parce qu’avec Women on Waves, l’action est nourrie d’un principe bien supérieur à l’acte qui le manifeste. Nous faisons en effet une différence de lecture entre l’acte de mise en visibilité et l’action centrale de l’association, entre le moyen et la finalité. Par ailleurs, en intégrant une biennale d’art contemporain, si l’association parie sur la visibilité et la communication, elle met aussi à l’épreuve l’action militante jusqu’à prendre le risque de la déperdition du message. En effet, la parole risquerait alors de verser dans le symbolique, du fait de sa médiation par l’art. Pourtant, nous pensons que la force des faits et de la réalité de l’action militante des Women on Waves l’emporte sur cette potentielle déperdition politique, puisqu’à aucun moment les membres de l’association n’ont voulu faire œuvre artistique de leur action militante, mais qu’ils ont au contraire cherché à innerver les pratiques artistiques (statut de l’artiste et de l’auteur, œuvre d’art, exposition, etc.) pour en faire des catalyseurs de prise de conscience et d’action.

Dans ce rapport complexe entre art et féminisme, il est primordial de mettre en lumière le fait que ni l’art ni le féminisme ne sont des champs autonomes et forclos sur eux-mêmes, au sens où l’un se réduirait aux problématiques de la femme et du genre, et l’autre aux questions de forme et de goût, tous deux étant dès lors dégagés d’influences et de pratiques. L’association Women on Waves pose ainsi frontalement au champ de l’art contemporain la question de l’engagement et surtout la possibilité d’y voir une action éthique forte.

Stratégiquement, les membres de Women on Waves, tels des pirates, agissent avant tout sur un décloisonnement multiple de tous les domaines, à tel point que les frontières qui opposent les nations n’existent plus, ni celles entre les terres et les mers, ou encore les lois et l’art, ou encore la médecine et la mode ; tout est en effet orienté vers un principe ultime qui est la fin de la criminalisation de l’avortement. La volonté ne s’embarrasse alors plus des limites, ni des espaces, puisque tout espace est restrictif et implique de fait une situation de dedans / dehors. C’est à travers cette situation de celui / celle qui est dedans et celui / celle qui est dehors, et surtout du choix de Women on Waves de montrer la dissolution possible des processus de cloisonnement, que nous pouvons essayer de comprendre, toujours d’un point de vue féministe, l’éthique qu’elle met en place dans son action militante.

L’espace infini des sans-loi ou la figure de la pirate

L’association Women on Waves s’organise depuis une dialectique du partage et de la redistribution des savoirs (ici médicaux et des droits individuels). Si la question de la propriété du corps est posée à travers la contraception et l’avortement, c’est une critique du corps médicalisé qui s’établit avant tout, et de la légitimité d’un État et d’une politique à légiférer dans ce domaine. Face à une situation d’injustice, Women on Waves pose donc la question de la responsabilité à partir d’une modalité d’action fondée sur la désobéissance civile organisée qui repose sur une forme de résistance et un refus d’allégeance à un gouvernement qui est jugé sur son incapacité à répondre à des besoins spécifiques. En naviguant dans les eaux internationales, l’association rend légale l’intervention volontaire de grossesse là où cette dernière était illégale… Dès lors, les membres de Women on Waves occupent l’espace indéfini des sans-loi. Le choix de travailler en eaux internationales souligne d’autant plus cette confrontation entre le légal et l’illégal qu’il fait exister cette transgression aux lois d’un pays dans un espace qui n’en est pas un, un autre espace-temps, une autre législation, le temps de subvenir aux besoins spécifiques des femmes du Portugal, d’Irlande ou de Pologne qui en ont fait la demande[3]. Les eaux internationales deviennent un instant l’espace des possibles. Suivant les besoins, l’action collective a la possibilité de créer l’espace, le temps, les lois nécessaires à leur accomplissement, la volonté et l’insurrection devenant alors seuls moteurs.

La portée politique des actions de Women on Waves se vérifie dans la démonstration de force qu’elle engendre des deux côtés de la barrière : autant du côté des femmes qu’elles aident que de celui des forces de police ou des militants « pro-life » qui s’opposent à elles. Le fait que le Portugal ait dépêché un navire de l’armée pour empêcher Women on Waves d’approcher les côtes révèle exactement cette opposition frontale entre les sphères publique et privée, entre les niveaux global et local, et la disproportion des moyens mis en action par les forces en présence.

Il ne s’agit pas, pour Women on Waves, de se limiter à lancer des pétitions, des lettres publiques, mais bien d’intervenir et d’apporter des alternatives concrètes à des situations induites par des politiques locales. Cette insurrection est celle de la minorité contre la majorité dirigeante, c’est celle d’une certaine éthique féministe contre les morales publiques. L’espace militant devient alors pleinement l’espace de l’action, confronté à la donne juridique, économique et morale.

Women on Waves redessine alors de nouvelles perspectives politiques, sans pour autant être intervenue directement ou frontalement contre les institutions dirigeantes du pays en question. Dans le cadre de cet activisme féministe, toute action doit être placée dans une perspective éthique afin de se prémunir contre des actions interventionnistes telles que nous les observons aujourd’hui dans l’actualité politique du droit d’ingérence. Il nous faut dès lors saisir comment les stratégies de Women on Waves, reposant sur une éthique de l’action, nous permettent d’exercer un regard critique sur le concept de droit d’ingérence et d’esquisser des alternatives.

Éthique féministe de l’action versus droit d’ingérence

À partir des stratégies mises en place par Women on Waves, les principes d’ingérence tels qu’ils se sont posés et continuent de l’être aujourd’hui dans l’actualité politique sont pointés et ré-interrogés. Cette question du rapport à l’autre et du mouvement que l’on fait vers l’autre, à savoir l’unilatéralité du geste ou la recherche de réciprocité, nous conduit à distinguer clairement l’action de Women on Waves du principe du droit d’ingérence.

En effet, la définition commune du droit d’ingérence est de s’introduire dans les affaires d’un autre État sans en avoir le droit, impliquant par là même la souveraineté de l’État qu’il invoque. Cette définition prend d’autant plus de sens critique lorsqu’elle est recontextualisée dans le rapport dissymétrique entre les « pays du Nord » et les « pays du Sud ». Si Women on Waves agit « illégalement » par rapport au droit national des pays criminalisant l’avortement, l’association n’intervient qu’à la demande expresse et concertée des collectifs féministes et des femmes.

Le droit d’ingérence est le révélateur de notre récit politique occidental[4]. À l’heure où le colonialisme ne peut plus avancer dévoilé, ce recours au droit d’égalité humain, caractéristique de la modernité occidentale, permet de légitimer une action injustifiable en se réclamant d’une valeur morale qui se prétend indiscutable. En effet, cette dernière est inscrite dans les constitutions et les inconscients collectifs, à travers par exemple l’affirmation des luttes d’émancipation des femmes voilées ou le fait de ne pas laisser mourir des populations, au point d’assurer un consensus universel autour d’un colonialisme du troisième type. La valeur de la vie humaine, qui est mise en avant dans les cas d’ingérence, permet de transgresser le droit en se substituant à la diplomatie. L’ingérence humanitaire est la preuve même que la notion de souveraineté des États n’est qu’une construction qui porte nos valeurs morales occidentales.

Le discours qui parcourt l’ingérence peut être selon nous envisagé comme un discours éthique, et c’est donc principalement sur ce plan qu’il faut le déconstruire pour en voir les limites et les dangers, dans la relation qu’il implique à l’autre et dans l’image qu’il donne de l’autre. Nous devons alors nous poser la question de l’influence de ces stratégies sur nos responsabilités individuelles et politiques. Concernant la question des droits de l’homme, nous pouvons être en accord avec les principes moraux qui les sous-tendent tout en dénonçant la façon dont ils sont utilisés. Il ne s’agit pas dès lors de rejeter la forme de l’action humanitaire en tant que telle mais d’en mettre à jour les présupposés implicites. Il faut se confronter à cette notion de démocratie et de droits de l’homme puisque le droit s’est déplacé sur le terrain des valeurs de ce qui est moralement juste. Le droit d’ingérence, tout comme le devoir d’ingérence, véhiculent donc un certain discours, un certain récit des droits de l’homme et de la démocratie qui justifie les interventions occidentales en leur nom. Le devoir d’intervention justifie l’acte d’ingérence à sens unique et s’inscrit dans une stratégie impérialiste.

Cette question de la souveraineté peut alors se déplacer, via une réflexion féministe, sur le terrain à la fois plus resserré et en même temps plus ouvert du rapport à l’autre, et à la notion de sujet souverain. Au travers du prisme du féminisme, Women on Waves n’agite pas le drapeau de la déclaration d’ingérence, mais pose bien plutôt la question générale du droit. Car c’est bien au contact des demandes des associations étrangères locales que l’intervention de Women on Waves se décide. De plus, elle va dans les eaux internationales, et ne pratique pas la stratégie de l’invasion des espaces ; tout se passe sur un terrain neutre et à l’appel des associations locales. Il s’agit toujours de cette question du rapport entre le sens unique et la réciprocité, entre l’ingérence et la coopération qui repose sur un accord entre les parties. Il y a une révolution culturelle à opérer dans nos relations aux autres, notamment par la prise en compte de la parole de l’autre comme possible mise en cause de la vérité de notre récit.

L’action de Women on Waves met donc en lumière une tendance récurrente de notre société occidentale à se réapproprier le projet des Lumières et de la Révolution française (à savoir principalement les notions d’égalité et d’universalité), une tendance dont on observe les répercussions à la fois au niveau du droit international, comme nous venons de le voir, mais aussi au sein même de politiques nationales, comme cela a encore récemment été le cas en France.

Le droit du Même à la différence : la rhétorique sarkozyste

Selon le projet des Lumières, les individus sont tous égaux et sans différence, mais cette identité du Même, du pareil, est posée depuis la politique de l’actuel gouvernement français dans un projet différentialiste par rapport à une norme de neutralité. Et c’est bien à partir de cette norme de neutralité que vont se poser les différences de chaque groupe culturel. Ce dernier point est totalement intégré à la rhétorique de Nicolas Sarkozy à propos des communautés et ce dernier a opéré un retournement stratégique en appelant au droit à la différence pour le Même ou le sujet souverain.

Lors d’une interview donnée au magazine Têtu en avril 2007, à l’heure où les thèmes sur l’homosexualité sont consensuellement soulevés par toute la presse, le candidat Sarkozy répond à la question de l’ouverture du mariage aux homosexuels, en argumentant que chaque groupe culturel (social, ethnique, de genre, sexuel, religieux) se pose dans sa différence systématique aux autres[5]. D’après lui, l’hétérosexualité reposerait elle-même sur la différence à l’autre. Il réussit à retourner la question en affirmant le droit de l’hétérosexuel à conserver pour lui seul le droit au mariage, posant ainsi le droit à la différence de la majorité (l’hétérosexualité). L’hétérosexuel n’est alors plus le référent au Même, il porte en lui un droit à la différence qui se traduit par la réappropriation du mariage comme singularité, appropriation à laquelle l’homosexualité ne peut accéder, parce que, dès lors, elle ne porterait plus la différence.

De plus, dans ce traitement politique de l’homosexualité, on observe une absence de typologie de l’homosexuel[6], et ce manque de visage est d’autant plus stigmatisant qu’il ouvre la porte à un amalgame globalisant, hors genre, classe sociale et race. À partir du moment où l’homosexuel n’a plus de visage, plus de droit à la différence positif ou discriminant, plus même le droit d’être stigmatisé, il ne peut plus se constituer depuis la position de l’opprimé, et dès lors les actes de résistance sont tués dans l’œuf.

Le mariage est donc pour Nicolas Sarkozy le droit à la différence hétérosexuelle tandis que, faisant son mea culpa, le PACS serait le droit à la différence homosexuelle, alors même que, d’après les chiffres, une grande majorité des PACS est contractée par des hétérosexuels. En rendant légitime le droit à la différence pour l’hétérosexualité, Nicolas Sarkozy parvient dès lors à légitimer la différence du droit. Sous ce régime de rhétorique équilibriste, tout l’enjeu des revendications féministes, homosexuelles ou anti-impérialistes repose sur cette nécessité de trouver au plus vite une réponse à cette nouvelle « gestion » juridique du droit à la différence. Les mouvements d’émancipation, après avoir mis en évidence le droit à la différence, doivent lutter aujourd’hui contre un effet pervers, largement illustré par cet effet rhétorique de Nicolas Sarkozy, qui serait celui de l’enchaînement logique selon lequel « droit à la différence » signifie « différence de droit ». La différence devient alors une terminologie générique marquant avant tout ce qui n’est pas de l’ordre du sujet souverain[7] [7] On peut rétrospectivement se demander si ce retournement…
suite.

En revendiquant le « droit à la différence », le militant prend dès lors le risque de voir le piège se refermer, puisque soit, il se retrouve exclu du fait même de sa revendication, soit s’il ne le revendique pas, il entre dans une invisibilité plus grande encore.

À partir de l’analyse de Women on Waves, nous réalisons combien il est important, avant même de se poser la question des stratégies d’émancipation, de réussir à mettre à plat le château de cartes juridique qui repose sur le fantôme du communautarisme et de l’universalisme. Ce qui nous amène à repenser de manière urgente les structures de ce projet républicain aujourd’hui appliqué par notre gouvernement dans sa généalogie politico-historique et dans la façon dont il fabrique des modalités de représentations sociales et culturelles depuis un soi-disant principe d’ouverture au communautarisme.

Octobre 2007.

Notes

[ 1] Cet article fait suite à une conférence donnée à deux voix au centre d’art du Plateau, à Paris, lors de la journée organisée par Élisabeth Lebovici, « Les temps d’art du féminisme » le 7 juillet 2007.Retour

[ 2] Voir leur site Internet : www.womenonwaves.org et www.womenonweb.orgRetour

[ 3] Les opérations les plus importantes ont eu lieu en Irlande en 2001, en Pologne en 2003 et au Portugal en 2004. Chacune a été accompagnée d’un réel travail de terrain avec conférences, lancement de pétitions et soutien aux associations et aux médecins.Retour

[ 4] Le principe de non-ingérence avait été introduit par l’ONU dans la Déclaration relative aux principes du droit international concernant les relations amicales et la coopération entre les États en 1970. Ce principe, en donnant une souveraineté légitime à chaque État afin qu’il s’affirme dans son autonomie politique, sociale, économique et culturelle, a été considéré à l’époque comme une façon de tirer un trait sur le colonialisme et comme un acquis du postcolonialisme. Pourtant, dans un contexte de crises politiques, de famines et de guerres, les pays occidentaux industrialisés ont posé comme fondement à la légitimité de la souveraineté d’un État la démocratie et l’accès à l’hygiène et la santé, d’après le modèle des Lumières. Pourtant, ces deux valeurs sont essentiellement culturelles et historiques, construites depuis un point de vue blanc, bourgeois, hétérocentré et masculin. Depuis 1988, dans un mouvement de retournement idéologique, le droit d’ingérence est reconnu par le droit international. De fait, certains États, à l’aune de valeurs morales « universelles », s’arrogent le droit d’intervenir dans les affaires intérieures d’un État tiers, souvent un pays émergent et parfois anciennement colonisé, en se référant à la Charte universelle des droits de l’homme. Par exemple, sous couvert de l’égalité humaine, les femmes afghanes ont servi de prétexte à l’intervention militaire en Afghanistan, de même que les femmes voilées algériennes avaient été l’un des prétextes à l’intervention française en Algérie. L’application du droit d’ingérence est censée se faire sous mandat de l’ONU mais ce mandat peut être fourni rétroactivement, ce qui induit une quasi-impunité de l’intervention militaire.Retour

[ 5] « On pourrait ensuite se demander si le respect de la différence est bien cohérent avec la volonté absolue de certains de couler tout le monde dans le même univers juridique. Je pourrais, moi aussi, m’amuser et m’interroger : est-ce que c’est respecter la différence que de demander aux hétérosexuels de partager le même cadre juridique que les homosexuels ? On peut considérer que cela, ce serait le non-respect de la différence. Le but, c’est établir socialement un amour, un couple, de créer des droits sociaux, patrimoniaux, fiscaux, des droits de séjour. Je pense que je respecte totalement la différence en créant les conditions d’une union civile adaptée à une situation particulière qui est celle des homosexuels », Têtu, n°121, avril 2007, p. 89.Retour

[ 6] Là où il y a une typologie de l’étranger (banlieues, sans-papiers, Arabe, Noir…)Retour

[ 7] On peut rétrospectivement se demander si ce retournement sémantique quant à la « nature » de chacun, via sa sexualité et donc son appartenance ou non à une norme, n’était pas une analepse à tout ce qui allait venir, depuis le concept d’une pédophilie et d’une tendance suicidaire génétiques jusqu’aux tests ADN comme procédure légitimant un regroupement familial. Là où une certaine conception de la Nature est convoquée, il faut savoir placer des barricades.Retour