Archives par mot-clé : fiction

Allégories d’une nation dilacérée : le sertão de Glauber Rocha, par

Le copyleft et la théorie de la propriété, par

La propriété des biens immatériels, c’est-à-dire le droit pour les auteurs et leurs producteurs d’exclure les autres de leur usage au moins temporaire, semble avoir triomphé. Mais les créateurs et les utilisateurs de logiciels libres bousculent ce paysage. Si les créateurs de free software restent propriétaires de leurs produits et libres de légiférer sur leur utilisation, les utilisateurs ne sont pas libres d’exclure les suivants. Il se forme de ce fait un réseau de propriétaires-utilisateurs différencié, un commun, garanti par les différentes formes de licence Creative commons. L’auteur se fait hacker, membre d’une communauté quasi-artiste par laquelle il fait reconnaître ses élégances de programmation. Le propre et le commun ne sont plus antinomiques, et les propriétés deviennent plurielles et inclusives.

Copyleft and the theory of property

The principle of property, i.e. the (temporary) right for authors and producers to exclude others from the use of their product, seems to have succeeded in imposing itself on immaterial goods. However, creators and users of free software challenge this apparent success: while creators remain free to regulate the use of their creations, users are not in a position to exclude other users. Thus appears a multi-layered network of owners-users, a common territory, maintained through licences modulated by Creative Commons. The author is turned into a hacker, a member of a quasi-artistic community admiring the elegance of his programs. The privately owned and the common are no longer antinomic, as properties become plural and inclusive.

De la sousveillance, par

Big Brother n’existe pas, il est partout, par

Éric Sadin évoque au cours d’un entretien en deux parties, l’apparition récente et historiquement inédite d’un « bouillon de culture » favorable à l’instauration et à l’intensification progressive de techniques dressées en vue de pénétrer les comportements. Il décrit ce composé comme étant formé – 1/d’une architecture technologique sophistiquée – 2/d’un environnement géopolitique instable qui situe désormais la collecte de données comme le socle stratégique décisif – 3/d’une science marketing qui ambitionne de deviner en amont les désirs des consommateurs grâce à l’analyse des traces numériques disséminées par nos actions quotidiennes. La portée des incidences anthropologiques, politiques, sociales, juridiques, induites par cette « maille globale » est explorée dans la spécificité de chacune de ces dimensions autant que dans leurs complexes interactions.

The New Paradigm of Surveillance and Big Brother does not Exist (although He’s Everywhere)

In an interview in two parts, Éric Sadin analyzes the new conditions which make possible the intensification of various techniques devoted to the penetration of our behaviors. These conditions are 1) a sophisticated technological architecture, 2) a geopolitical environment which provides the collection of data with crucial strategic stakes, and 3) marketing techniques which track, compute and guess consumer behaviors. The anthropological, political, social and judicial implications of this tracking, computing and guessing are countless.

Au-delà de Google Les voies de l’intelligence collective, par

Contre l’hégémonie de Google Cultivons l’anarchisme des connaissances, par

Dans cet échange, Karlessi, membre du groupe Ippolita, souligne l’existence d’une face obscure de Google qui, à l’aide de « cookies », parvient à créer une technique de plus en plus fine de profilage des internautes. Cette somme d’informations se constitue afin de permettre la mise en relation de l’individu avec une publicité de mieux en mieux ciblée. Cette technique de saisissement de l’internaute s’accompagne aussi d’un appauvrissement des formes d’investigation de ce dernier, de plus en plus soumis au moteur de recherche et à son hégémonie sur le Net. C’est la raison pour laquelle la démarche collective d’Ippolita propose de sortir de la passivité vis-à-vis de la technologie et d’inventer d’autres formes de relation à la technique, ainsi qu’entre les êtres. Les « scookies » sont ainsi une de leurs propositions pour brouiller les pistes de ce fichage par Google, en permettant aux internautes d’échanger leurs « cookies ». Démarche tournée vers une quête : celle de faire de nous tous des poètes !

let’s promote Knowledge Anarchism
In this conversation, Karlessi, a member of the group Ippolita discusses the darker face of Google, which, with the help of cookies, finds ever finer ways to profile Internet users. The information is gathered in order to allow for a close match between advertisement and the individual targeted. This leads to an impoverishment of research in the Net, increasingly submitted to the hegemony of a single search engine. For this reason, Ippolita proposes a new form of agency through the use of « scookies », which allow Internet users to exchange their cookies and erase all the traces that allow Google to profile them. Ultimately, the intention is to make a poet out of each one of us !

La mutation androïde de Google : radiographie d’un imaginaire en actes, par

Au-delà de sa technique et de ses usages, qui se veulent modestes, Google a pour carburant un imaginaire démentiel, héritier de l’intelligence artificielle forte de la fin des années 1950. Son symbole pourrait en être la « Singularity University », université d’été qu’il finance à partir de juin 2009 et qui tourne autour du concept de « singularité », développé par le techno-prophète et « transhumaniste » Ray Kurzweil. Selon ce dogme, la vie tient non à la matière mais à son organisation, donc à l’information. L’imaginaire de Google, tel que porté également par sa plate-forme open-source Android pour terminaux mobiles, aboutit à la vision, d’ici une ou deux générations, d’agents personnels d’information de l’ère « Post PC ». Ou encore à une IA Google qui « vivrait » en quelque sorte au travers de personnes robotiques, anges gardiens qui connaitraient tout de nous et pourraient devenir (sans rire) nos « meilleurs amis »…

The mutation of Google android
In addition to its technology and its uses, which are claimed to be modest, Google’s fuel is an insane imagination, heir to the artificial intelligence of the late 1950s. Its symbol could be the «Singularity University», a summer school it funds since June 2009 and which revolves around the concept of «singularity», developed by the techno-prophet and «transhumanist» Ray Kurzweil. According to this dogma, life is not about matter but about its organization, which is information. The imaginary world of Google, and also of its open-source platform for mobile devices called Android, leads to the vision of a post-PC era of personal information agents in one or two generations. Or even to an AI era where Google will « live » in some way through robotic persons, guardian angels who know all of us and could be (no pun intended) our “best friends” …

En Bolivie, une victoire difficile, par

Les transformations de la structure de classe associée au néolibéralisme en Bolivie pourraient être, paradoxalement, les conditions de possibilité pour l’émergence de propositions plurielles et pluriculturelles. L’épuisement des promesses jamais satisfaites de la modernité eurocentrée, l’altération des hiérarchies traditionnelles aux différents niveaux géographiques (localité, région, État, international) engendrée par les formes dans lesquelles se manifeste la globalisation dans les périphéries, et le retour – volontaire et planifié – à une souveraineté étatique qui n’a jamais été qu’une aspiration créole-urbaine, ont rompu les certitudes traditionnelles : les futurs imaginables, les formes d’organisation classiques, les sujets de changement et leurs identités, les classifications géographiques et raciales.

The transformations undergone by the class structure associated with neoliberalism in Bolivia could be, paradoxically, the conditions for the possibility of an emergence of more plural and pluricultural propositions. The exhaustion of perpetually unsatis fied promises of eurocentric modernity, the alteration of traditional hierarchies at different geographical levels (local, region, state, international) engendered by the forms in which globalisation manifests itself in the peripheries, and the – voluntary and planned – return to a state sovereignty which was never more than a creole-urban aspiration, have broken traditional certainties: imaginable futures, classic forms of organisation, subjects of change and their identities, geographical and racial classi fications.

multitudes