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Charismes du réel, par

L’oeuvre d’art à l’époque du marketing et du spectacleLe monde qui semble aujourd’hui s’imposer dans sa vérité est celui qui se donne, en même temps, avec un surplus de réalité (de proximité, de vie ordinaire, de banalité) et un surplus de fiction (de spectacle, de lueur médiatique, d’évasion onirique). Dans ce régime de vérité hybride, la réalité
est essentielle, car seule la proximité mimétique avec l’homme ordinaire donne à l’acte culturel toute sa force de séduction ; mais la réalité n’arrive à séduire que si – grâce à son exposition médiatique – elle se déréalise en quelque sorte, en se revêtant d’une certaine « aura ». Le problème est que ce charisme de la réalité, effet de la mise en spectacle industrielle de la réalité elle-même, se présente aujourd’hui comme une exigence propre tant à l’homme de la politique qu’à l’homme de la culture. Comme le montre l’exemple de l’Italie, la convergence obscure d’un populisme spécifiquement politique et d’un populisme plus généralement culturel rend le problème actuel du populisme d’autant plus profond et redoutable.

Charismas of the Real

The Work of Art in the Age of Marketing and Spectacle

Today’s world imposes itself with a surplus of reality (proximity, ordinary life, banality) and with a surplus of fiction (spectacle, mediatic light, dreamlike entertainment). In this regime of hybrid truth, reality is essential, since only the proximity with ordinary life provides cultural action with its force of seduction; but reality can please only when de-realized by its mediatic exposure and supplemented by a certain “aura”. This charisma
of reality imposes itself to political as well as cultural agents. The case of Italy shows the obscure convergence between a political and a cultural form of populism, making it all the more formidable.

Les ONG mexicaines de genre, par

Après deux décennies de globalisation politique, normative et économique, les pratiques des ONG mexicaines, ont connu un mouvement centripète puis un retour centrifuge sur le local, presque obligé. Leur projection dans des enjeux planétaires n’est pas contestable vu le nombre de militant-e-s qui ont participé aux conférences onusiennes pivotales du Caire (1994) et de Pékin (1995). Cependant elle a été suivie d’un «retour» au local brutal pour des dizaines, voire centaines d’organisations qui ont vu se tarirent la masse de grants des fondations étasuniennes et de l’USAID. Pour les grandes ONG de la capitale, il a été possible de dégager 20 à 25 % des revenus de services payants et de donner ainsi des gages de «bonne conduite» économique aux bailleurs philanthropiques. Pour l’immense majorité des ONG du pays qui participèrent à ce mouvement, le repli sur des situations précaires de sous-traitances n’a fait qu’ancrer toujours plus les militant-e-s dans les jeux politiques partisans locaux et les ont d’autant plus éloignées de l’idéal de gouvernance démocratique nord-américaine.

Mexican Gender NGOs

Following two decades of political, normative and economic globalization, the practices of Mexican NGOs went through a period of centripetal and then, almost against their will, back to centrifugal, local-centered, movement. Their role in planetary issues is undeniable, considering the number of activists who took part in the pivotal UN conferences in Cairo (1994) and Beijing (1995). But this was followed by a “return” to local affairs that was brutal for tens, or even hundreds of organizations who saw the bulk of the grants they received from American foundations and USAID dwindle. The larger NGOs, based in the capital, were able to draw 20 to 25% income from paid services and therefore give their philanthropic donors proof of “good economic behavior”. For the overwhelming majority of the country’s NGOs drawn into this movement, having to go back to precarious sub-contracting situations anchored the activists ever more in local partisan political games, and brought them even further away from the North American ideal of democratic government.

Les ONG, outils de gouvernance global, par

Les ONG ne sont-elles pas de meilleurs inoculateurs des normes globales que les États-nations ? Leurs modes d’intervention garantissent-ils à ces normes le caractère démocratique qu’elles affichent ? L’exemple d’une entreprise sociale dans le domaine de la santé au Bengladesh montre une forte tendance à réinstaurer une hiérarchie entre personnes secourues et professionnels. En Ouzbékistan post-socialiste l’importation de la démocratie qui avait séduit les élites dans un premier temps n’a pas empêché l’instauration de la dictature. En Chine les ONG enregistrées par l’État se saisissent des problèmes difficiles en utilisant des travailleurs sociaux formés dans les Universités. Un travail social bénévole est un bon point pour obtenir un emploi. Il y a aussi des ONG d’environnement en conflit avec le gouvernement à l’échelon local. Les ONG de genre émergent. Les ONG hésitent entre participation et dissidence, permise par Internet. L’État essaie de les intégrer dans une sorte de Care d’État.

NGOs as Tools of Global Government

Are NGOs not better inoculators of global norms than Nation-states? Do their means of action guarantee these norms the democratic character they claim to stand for? The example of a social company working in the health field in Bangladesh shows a strong tendency to reestablish a hierarchy between assisted people and professionals. In post-socialist Uzbekistan, the introduction of democracy that drew the elites at first was unable to prevent the establishment of a dictatorship. In China, state registered NGOs address difficult problems, using social workers training in the Universities. Volunteer social work is a plus when applying for a job. There are also environmental NGOs in conflict with the government on the local level. Gender NGOs are emerging. NGOs hesitate between participation and dissidence, made possible by the Internet. The State is attempting to integrate them into a sort of State Care.

La métamorphose du cercueil, par

Les premiers articles de Thierry Secretan consacrés aux cercueils figuratifs du Ghana remontent à 1988 (Sunday Telegraph, GEO, Life). À travers ces articles, un film documentaire puis un livre (Il fait sombre va t’en, édition Hazan, 1994, Going into Darkness, Thames&Hudson, 1995), il a révélé au monde occidental
cet art funéraire né à la fin des années 1950 au Ghana et en a établi les origines.

En 1999, Erimore, retraitée écossaise, vit deux de ces cercueils ghanéens,
une Mercedes et une pirogue, disposés sur le plateau d’une émission de télévision anglaise. Ils appartenaient à une entreprise de pompes funèbres
de Bristol à laquelle Erimore passa aussitôt commande : son cercueil serait une réplique de l’avion utilisé par les Red Arrows, la patrouille d’Angleterre. Le cercueil d’Erimore, reproduit dans toute la presse britannique fit des émules et à ce jour une douzaine de citoyens anglais ont passé commande.

L’adoption d’une coutume africaine par des Européens est en soi un fait culturel rare. Dès lors Thierry Secretan a décidé de rencontrer ces Anglais, de les interroger, puis de les photographier auprès de leur cercueil, essayant de comprendre comment ils tentent de donner un sens à leur mort.

The metamorphosis of the coffin

The first articles by Thierry Secretan concerning the figurative coffins
from Ghana appeared in 1989 in The Sunday Telegraph, GEO and Life, introducing the western world to this funeral art. Later Thierry Secretan’s documentary film and his book (Il fait sombre va t’en, Hazan, 1994, Going into Darkness, Thames & Hudson Ltd, 1995) revealed under which circumstances this art was born in Ghana at the end of the 1950’s.

In 1999, Erimore, a Scottish lady, saw two of these coffins on a British TV show. They belonged to a Bristol funeral parlour to which Erimore placed an order: her coffin would take the shape of the fighter plane used by the Red arrows, the national air team. Erimores’s coffin widely advertised in the British press provoked more orders throughout the United Kingdom.

Europeans borrowing an African custom is a rare phenomenon. Thierry Secretan decided to meet these customers, to photograph them next to their coffin and to interview them about their motivations.

Changer de lunettes pour lire le cas afghan, par

Responsable de la mission Réduction des risques de MDM à Kaboul il décrypte le cas afghan fournissant une analyse forte, une clé de compréhension et des pistes de réflexion. Dans un État afghan délégitimé, gangrené, au plus haut niveau, par le trafic de drogues, une économie légale ne reposant que sur l’aide internationale et une économie illégale mais bien réelle, celle de la drogue, obèrent toute possibilité de reconstruction, de paix et de développement. Pour lui et son équipe à Kaboul la Réduction des risques ne se
résume pas uniquement à une approche médicale, psychologique et sociale, soucieuse du respect des droits de l’homme, mais constitue plus largement une sorte de cheval de Troie permettant de bousculer les catégories du débat sur les enjeux de la lutte anti-drogue et de « la Réduction des Risques mondiale ».

New Glasses to read the Afghan Case.

Mission Manager for the Reduction of Risk of MDM in Kabul, Olivier Maguet decrypts the Afghan case proposing an analysis, a key to understanding and some clues for thinking. In a delegitimized state, corrupted at the highest level by the drug traffic, and illegal economy, but so real, the economy of drugs, cut off any possibility of reconstruction, peace and development. For him and his team in Kabul, the Reduction of Risk is more than just a medical approach, psychological and social conscious respect for human rights, is like the Trojan horse, which make possible to shake up the categories of debate concidering the issues of anti-drug fight and “global Reduction of Risk”.

La financiarisation de la connaissance, par

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