Archives par mot-clé : entretien

#MeToologies ou les  ciseaux de Vanessa  Springora, par

Pour une culture critique de l’IA, par , et

Pour un design alternatif de l’IA ?, par , et

Zone de contact autour d’histoires d’objets mal acquis, par

Zone de contact autour d’histoires d’objets mal acquis
L’association Alter Natives a voulu mobiliser autour des enjeux de la restitution d’objets africains des personnes peu enclines à fréquenter les musées qui les conservent. L’expérience se nomme Zone de contact/Objets d’ailleurs. Il s’agit pour des jeunes franciliens d’entrer dans les réserves des musées, de choisir certains objets d’origine non européenne, d’enquêter sur leur biographie pour savoir d’où ils viennent et d’être en mesure d’expliquer leur parcours au reste de la population. Dans ce projet de long terme, ancré sur des territoires divers, la restitution des objets mal acquis n’est donc pas le mobile principal. Ces actions permettent de tester des outils pour établir un autre type de rapport aux savoirs et développer une relation directe avec les populations dont sont issues ces objets, dans leurs pays d’origine, d’Afrique essentiellement.

Contact zone around stories of
ill-gotten objects
The Alter Natives association wanted to mobilize people who are reluctant to visit the museums that preserve them around the issues of the restitution of African objects. The experience is called Contact zone/Objects from elsewhere. It involves young people from the Ile-de-France region entering museum reserves, selecting objects of non-European origin, investigating their biography to find out where they come from and being able to explain their journey to the rest of the population. In this long-term project, anchored in various territories, the restitution of ill-gotten objects is therefore not the main motive. These actions make it possible to test tools to establish another type of relationship with knowledge and to develop a direct relationship with the populations from which these objects come, in their countries of origin, mainly in Africa.

Les morts sont des gens comme les autres, par

Les morts sont des gens comme les autres
« Les morts sont des gens comme les autres ». Cette constatation m’a été faite par Philippe, médium dans le groupement spirite de la ville où j’habite, lors d’un entretien que nous avons mené avec sa mère Michèle, et lui. Je leur avais demandé de m’expliquer comment ils entraient en communication avec les défunts – qu’est-ce qu’entendre, sentir ou voir signifient dans pareil cas ? Nous avons évoqué leur histoire, leurs destins peu communs, avec ces épreuves, ces mises en danger du corps et ces démêlés avec la mort, ces sentiments de présence et ces surprenants rêves prémonitoires. Des destins que ces personnes ont réussi à socialiser et su transformer en destinée. Le fait que les morts soient des gens comme les autres a de multiples conséquences, et notamment celle d’une obligation à prendre soin d’eux. Et à prendre soin, en leur nom et à leur demande, de ceux qui restent. Les séances au cours desquels ils sont convoqués deviennent dès lors de véritables dispositifs thérapeutiques, dans lesquels et par lesquels, les habitants de deux mondes apprennent, les uns avec les autres et les uns pour les autres à réactiver des liens, des élans de vie et de joie.

The dead are people like the others
“The dead are people like the others”. This observation was made to me by Philippe, a medium in the Spiritist group of the city where I live, during an interview with him and Michèle, his mother. I had asked them to explain to me how they communicated with the dead – what does hearing, feeling or seeing mean in such a case? We have evoked their story, their unusual destinies, with these trials, endangerments of the body and trouble with death, these feelings of presence and these surprising premonitory dreams. Destinies that these people have managed to socialize and transform into destiny. The fact that the dead are people like the others has multiple consequences, including the obligation to take care of them. And to take care, on their behalf and at their request, of those who remain. The sessions in which they are summoned thus become true therapeutic devices, in which and by which, the inhabitants of two worlds learn, with each other and for each other, to reactivate bonds, impulses of life and of joy.

Est-il trop tard pour l’effondrement ?, par , et

Est-il trop tard
pour l’effondrement ?
Cette introduction invite à décadrer et à recadrer la thématique de l’effondrement, popularisée et médiatisée par la théorie dite « collapsologie », vers le plan des acteurs, des terrains, des temporalités, et des régimes d’énonciation. Nous appelons à documenter empiriquement ce que fait l’effondrement, et ce qu’en font celles et ceux à qui cette idée « fait » quelque chose. En effet, l’effondrisme pose la question des façons de se positionner non pas uniquement par rapport à une théorie, mais également par rapport à des expériences individuelles et collectives. Le dossier vise à comprendre comment la réception de la « collapsologie » donne lieu à des jeux complexes entre désemparement et capacités d’agir. L’atterrissage sur un sol anthropocénique de plus en plus critique mérite une décisive discussion collective. L’hypothèse de cette majeure est que les expériences effondristes ont une valeur d’expérimentation à cet égard, notamment en créant un zone discursive et praxique où des cultures et des expériences politiques différentes sont amenées à se rencontrer et à collaborer.

Is it too late for collapse?
This introduction invites the reader to displace and reframe the theme of collapse—which currently receives heavy media coverage—towards a sociological approach to the actors, the places, the temporalities and the regimes of discourse. We claim the need empirically to document what collapse does to people, what people do with it, once they are touched by this idea. Collapsology calls for people to position themselves not only in relation to a theory but, more importantly, in relation to individual and collective experiences. This issue attempts to understand how the reception of collapsology provides a location for complex interplays of disarray and empowerment. Landing on an and ever more critical Anthropocenic ground deserves collective discussion. This issue promotes the hypothesis that collapsological experiences provide occasions for experimentations, by creating discursive and practical zones where different political cultures and practices can meet and collaborate.

La « civilisation écologique » contrôlée par le numérique en Chine, par

La « civilisation écologique » controlée par le numérique en Chine
Le concept de « civilisation écologique » a initialement été développé par des intellectuels chinois, à la fin des années 1980, comme une critique de la modernité industrielle et du système capitaliste face à la catastrophe écologique planétaire en cours. À partir du milieu des années 2000, et suite à l’accentuation des contestations environnementales dans les grandes villes du pays, le Parti Communiste Chinois (PCC) a décidé de faire de cette notion un de ses slogans politiques phares, mais au prix de vider ce concept de sa dimension critique pour l’instrumentaliser au service de la propagande d’État, de la croissance verte et du contrôle numérique des écosystèmes. La Chine serait-elle en train d’inventer de nouvelles normes de gouvernance ?

Digital Control as a Environmental Policy according to the Chinese Communist Party
The concept of «ecological civilization» was initially developed by Chinese intellectuals in the late 1980s as a critique of industrial modernity and the capitalist system, in the face of the ongoing global ecological catastrophe. Starting in the mid-2000s, and following the intensification of environmental challenges in the country’s major cities, the Chinese Communist Party (CCP) decided to make this notion one of its flagship political slogans, but at the price of emptying this concept of its critical dimension, to use it in the service of State propaganda, green growth and digital control of ecosystems. Is China inventing new standards of governance?

Lire et vivre dans les ruines : Tsing et Sebald, par

Lire et vivre dans les ruines : Tsing et Sebald
À partir du Champignon de la fin du monde d’Anna Tsing, ce texte interroge l’imaginaire résolument optimiste de découverte et de reconquête nourrie par l’attention à ce qui échappe à la destruction, propre à plusieurs travaux récents. Revenant sur la position du chercheur avide de nouveaux récits, soucieux également de ne pas les écraser sous des jugements déterminant a priori ce qui compte et ne compte pas, au risque de les étouffer, l’article invite cependant à ne pas négliger la dimension de perte associée aux catastrophes passées et en cours. À cet égard, il convoque d’autres voix, en dehors des sciences sociales, en particulier celle de l’écrivant allemand W.G. Sebald, lequel accorde une place très importante aux ruines et à la remémoration des mondes perdus, de ce qui a compté pour les disparus, tel l’inlassable effort caractérisant la vie au sein des milieux fragiles.

Reading and Living in the Ruins: Tsing and Sebald
Musing from Anna Tsing’s Mushroom of the End of the World, this article questions the resolutely optimistic imagination of discovery and reconquest nourished by the “arts of attention” to what escapes the destruction, promoted in many recent works. Returning to the position of the researcher eager for new stories, also anxious not to crush or stifle them under judgments determining a priori what should or should not count, the article invites us not to neglect the dimension of loss associated with past and ongoing disasters. In this regard, it calls in other voices, outside the social sciences, especially that of the German writer WG Sebald, who gives a very important place to the ruins and the remembrance of the lost worlds, of what counted for the disappeared, as a tireless effort characterizing life in fragile environments.

Faut-il « avertir de la fin des temps pour exiger la fin des touillettes » ?, par

Faut-il « avertir de la fin des temps pour exiger la fin des touillettes » ? Les ressorts de l’engagement écocitoyen
À partir d’une incursion sur les forums électroniques d’« effondrés », cet article se penche sur ce que l’idée d’effondrement fait à celle et ceux qui y adhèrent. En décalage avec des questionnements sous l’angle des risques de démobilisation ou de dépolitisation, on voit que cette idée, en stimulant l’exploration en commun des relations concrètes et situées, peut favoriser une radicalisation du rapport au réel. Au contraire d’une fabrique de l’ignorance et du désemparement, les groupes Facebook des « effondrés » apparaissent comme des espaces d’exploration partagée, où les prises et les pistes le disputent sans cesse au désarroi. On peut alors voir, dans la fortune du terme effondrement, l’indice d’une multiplication des enquêtes lancées pour retrouver une terre où atterrir en expérimentant de nouveaux détachements-attachements.

Are Apocalyptic Threats Necessary to Recycle Plastic Spoons? On the Dynamics of EcoPolitical Involvement
Based on an incursion into the electronic forums of collapsonauts, this article looks at what the idea of ​​collapse does to those who adhere to it. At odds with the denunciations about the risks of demobilization or depoliticization, we can see that collapsology, by stimulating the joint exploration of concrete and situated relations, can encourage a radicalization of the relation to reality. Far from being a fabric of ignorance and distress, Facebook groups of collapsonauts appear as spaces of shared exploration, where the emergence of affordances and new paths prevail over dismay. We can thus see, in the fortunes of the term collapse, the index of a multiplication of investigations launched to find place where Earthbounds can land by experimenting with new modes of detachments-attachments.

multitudes