Archives par mot-clé : combat

La réislamisation de la société bengladeshi, par

La réislamisation de la société bengladeshi
L’histoire politique du Bangladesh, complexe et contradictoire, démonte tous les fantasmes entretenus aujourd’hui sur l’islam, érigé en ennemi global prenant la suite du défunt communisme. Le pays est devenu indépendant en 1971 après une guerre de libération meurtrière qui a vu sa population musulmane s’affronter au Pakistan, créé par l’ex-colonisateur anglais de l’Inde comme nation musulmane. Son gouvernement s’affirme d’abord laïc avant de décréter l’islam religion d’État et d’entamer une profonde réislamisation de la société. Aujourd’hui cette dictature militaire islamique avec à sa tête la Ligue Awami, l’ancien parti indépendantiste, a liquidé régulièrement toutes ses oppositions politiques au nom de la lutte anti-terroriste mondiale.

The Re-Islamization of Bangladeshi Society
The political history of Bangladesh, complex and contradictory, dismantles all the fantasies held today about Islam, erected as a global enemy taking over from defunct communism. The country became independent in 1971 after a deadly liberation war that saw its Muslim population clash from Pakistan, created by the British ex-colonizer of India as a Muslim nation. Its government claimed to be secular before promoting Islam as the State religion and initiating a deep re-Islamization of society. Today this Islamic military dictatorship headed by the Awami League, the former independence party, has regularly liquidated all its political oppositions in the name of the global anti-terrorist fight.

L’Iran et sa (mal) représentation, par

L’Iran et sa (mal) représentation
L’Iran (notamment post-révolutionnaire) souffre deux fois de sa mal-représentation. Non seulement, à l’intérieur des frontières, le décalage entre la diversité sociale et l’État islamique installé depuis la révolution de 79 s’est creusé, mais également, dans sa perception à l’extérieur, cette révolution a réactivé des lectures culturalistes. Nous mobilisons dans cet article le concept de « représentation », qui implique des significations politiques et esthétiques, afin de dessiner un autre tableau des tensions entre la société iranienne et son État. Le blocage de la représentativité démocratique par le gouvernement a conduit la société iranienne, en quête de son image, à se tourner vers des modalités de plus en plus esthétiques. Ces sensibilités influencent le paysage politique, de même que les représentations esthétiques sont toujours susceptibles de prendre un sens politique. C’est à ce conflit des images dans le contexte iranien que nous nous intéressons.

Iran and its (Mis) Representation
Iran (especially post-revolutionary Iran) suffers twice from its misrepresentation. Not only has the gap widened within its borders between social diversity and the Islamic Republic installed since the revolution of 1979. In its perception outside, this revolution has also reactivated culturalist readings. In this article, we mobilize the concept of “representation”, in its political and aesthetic meanings, in order to draw another picture of the tensions between Iranian society and its State. The government’s blockage of democratic
representation has led Iranian society, in search of its image, to turn to increasingly aesthetic modalities. These sensibilities influence the political landscape, just as aesthetic representations are always susceptible to receive and carry political meaning. It is this conflict of images in the Iranian context that we are interested in.

Femmes iraniennes en lutte
Le cauchemar du régime islamique, par

La République islamique d’Iran
Entre survie économique et ambitions nucléaires, par
et

La République islamique d’Iran
Entre survie économique et ambitions nucléaires
L’auteur analyse la politique intérieure et extérieure de la République islamique d’Iran en phase avec une situation économique et sociale très dégradée et un contexte géopolitique fortement bousculé ces derniers temps. L’élection du nouveau président Joe Biden aux États-Unis, la surenchère de l’Iran sur le programme d’enrichissement de l’uranium, les élections iraniennes prochaines avec une tendance néoconservatrice annoncée, le rapprochement israélo-gulfien obligent à rebattre les cartes. Comment ces phénomènes vont-ils se croiser et dans quel sens ? Apaisement ou au contraire durcissement des positions ? Sur quels alliés l’Iran peut-il compter ? Dans quelle mesure la population iranienne exerce-t-elle une influence sur les orientations gouvernementales du pays à l’extérieur de ses frontières ?

The Islamic Republic of Iran
Between Economic Survival and Nuclear Ambitions
The author analyzes the internal and external policies of the Islamic Republic of Iran, in line with a seriously deteriorated economic and social situation and a geopolitical context that has been greatly shaken up recently. The election of the new President Joe Biden in the United States, Iran’s escalation of its uranium enrichment program, the upcoming Iranian elections with a neo-conservative tendency, and the Israeli-Gulf rapprochement call for a reshuffling of the cards. How will these phenomena intersect and in what direction ? Appeasement or, on the contrary, hardening of positions ? Which allies can Iran hope? To what extent does the Iranian population exert an influence on the country’s governmental orientations outside its borders ?

Écrire à l’hôpital, une petite guérilla…, par

Écrire à l’hôpital, une  petite guérilla…
Face à la sidération provoquée par la pandémie, devant l’incertitude des lendemains et un avenir anxiogène, il est nécessaire plus que jamais de mettre en valeur l’importance de nos affects, de nos émotions, et de retrouver du lien. Les ateliers d’écriture à l’hôpital et en Ehpad sont emblématiques de la place cruciale l’artiste, de l’écrivain, dans les lieux où résident les populations vulnérables. Il ne s’agit pas de saupoudrer une activité vaguement socio culturelle, afin de légitimer la place de l’art dans la cité grâce à des intervenants bienveillants… mais d’inventer de véritables situations à l’intérieur desquelles prendra forme une communauté de dialogue. Le quatuor formé par le soignant, le patient, le parent (en pédiatrie), et l’auteure, instaure une dimension sensible qui viendra adoucir, transformer la médecine traditionnelle fondée sur le diagnostic et les traitements.

Writing Within the  Hospital: A  Discrete Guerilla…
The sideration, the uncertainty, and the anxiety provoked by the pandemic makes it more necessary today than ever to value the importance of our affects and our emotions, to allow for renewed ways of making connections with each other. Writing workshops in hospitals and retirement homes are emblems of the crucial role of the artist, of the writer, in places of residence for vulnerable populations. They are not a simple sprinkling of a vaguely sociocultural activity that helps legitimize the place of the arts in our society through benevolent “social workers”… they are opportunities to invent actual situations within which a community of dialog can emerge. The quartet formed by the caregiver, the patient, the parent and the author provides the context for a sensitive relationship that can soften or even transform traditional medicine and its diagnostical and pharmalogical basis.

Actualités de l’entre-nous, par

Actualités
de l’entre-nous
« Un coworking sans communauté n’existe pas. » Qu’est-ce qui sépare les nous du tiers-lieu de ceux de la start-up (plus ou moins nationalisée) ? Qu’est-ce qui distingue les bretelles (d’un nous relativement dilaté, diffracté ou bifurquant) des autoroutes (du je au cœur du développement personnel comme du nous des team buildings et atelier de we design) ? L’auto-affectation d’un soi mis au pluriel tente, par un simple jeu pronominal, de cacher son intention de relier tout le monde. À travers les reflets de ces belles âmes dans leurs variations esthétiques, cet article se propose de penser les réactualisations de la standardisation psychique mondiale en montrant comme elles brouillent de quel entre-nous ça parle. On part d’une série de citations des stars de la république des lettres. Direct, on multiplie les formes de déterritorialisations énonciatives comme autant de traversées d’un nous attaché à son incertitude d’échelle et excité par ses anachronismes : expérience originelle de l’autre comme soi, atelier alter-constructiviste, méditation auto-décentrante, réunion anti-facilitatrice, contre-point sur la situation actuelle.

News From the Segregated We
“There is no co-working without a community.” What is separating the we of the third spaces from the we of the start-up (more or less nationalized)? Is it possible to distinguish the off-ramps (of the dilated, of the diffracted, of the bifurcating we) from the highway (of the I of personal development, but also of this other we of team building and we designs)? The auto-affection of the pluralized self is an attempt, by a substitution of pronouns, to hide a not-so-secret intention to connect everybody to everybody. Investigating the reflections of these globalized “beautiful souls” in their aesthetic variations, this paper intends to think the reactualizations of world-integrated psychic standardization, in showing how they blur the we they refer themselves to. The starting point is a series of quotes from stars of the republic of letters. And it immediately shifts to forms of enunciatory deterritorializations, ways of coursing through a we attached to its own scalar uncertainty and excited by its own anachronisms: an original experience of the other as self, an alter-constructivist workshop, a self-decentering meditation, an anti-facilitating reunion, a counterpoint to the now.

L’art queer de ne pas réussir, par

L’art queer de ne pas réussir
Passant du cinéma d’animation pour enfants (en suivant les exemples de films comme Chicken
Run
et Le monde de Nemo) aux artistes queer contemporaines qui ont embrassé l’échec comme un style à part entière, Jack Halberstam part à la recherche de modèles de parentés, d’alliances et de communautés pour faire alternative au monde néo-libéral et à l’idéologie du succès qui en façonne les subjectivités. Cette idéologie se déploie notamment au travers des multiples injonctions à « réussir » dans les différents aspects de la vie sociale : il faut produire, accumuler et se reproduire – autant de maillons dans la chaîne de (re)production du capital. Dans The Queer Art of Failure, Halberstam propose une méthode de déviance joyeuse par rapport à cette idéologie du succès : « d’abord, résister à la maîtrise » ; « ensuite, privilégier la naïveté et l’absurdité (la stupidité) ».

The Queer Art of Failure
Going from animated films for children like
Chicken Run and Finding Nemo to those queer contemporary artists and writers that have embraced failure as a style, Jack Halberstam is in the look out for models of kinships, alliances and communities that would provide an alternative to the neoliberal world and to the ideology of success that shape its subjectivities. This ideology unfolds through multiple injonctions to “success” in different aspects of social life : we must produce, accumulate and reproduce in order to satisfy the (re)productive obsessions of capital. In The Queer Art of Failure, Halberstam proposes a method of joyful deviance from sucess: “first, resist mastery”; “second, priviledge the naive and nonsensical (stupidity).

Le capital de l’imaginaire
Ce qu’il y a et ce qui n’est pas, par

Le capital de l’imaginaire
Ce qu’il y a et ce qui n’est pas
Le romancier et plasticien Sinzo Aanza interroge la place de l’artiste face au pouvoir depuis l’époque précoloniale jusqu’à nos jours dans le Congo contemporain. Ce qu’il appelle le « capital de l’imaginaire » se déploie avec et contre le pouvoir sur le marché de la valeur : tandis que les vendeurs de masques sont asservis par des discours d’authenticité fantasmée sur de l’art rituel, d’autres artistes s’attachent à dire l’expérience coloniale, l’exploitation des corps et des terres, dont les prédations minières contemporaines sont la continuation. C’est le rôle du poète et de l’artiste congolais qui est analysé en définitive, eux qui sont porteurs d’imaginaires tournés vers le futur et le monde.

The Capital of the Imaginary
What is and What is not
The novelist and visual artist Sinzo Aanza questions the place of the artist in the face of power, from pre-colonial times to contemporary Congo. What he calls the “capital of the imaginary” unfolds with and against power on the market of value: while mask sellers are enslaved by fantasized speeches of authenticity about ritual art, other artists focus on the colonial experience, the exploitation of bodies and land, of which contemporary mining predators are the continuation. It is the role of the poet and the Congolese artist that is ultimately analyzed, they who are bearers of imaginaries turned towards the future and the world.

Le Congo et Cuba
Pour une ré-existence des latitudes, par

Le Congo et Cuba
Pour une ré-existence des latitudes
Revisitant le voyage peu connu de Ernesto Che Guevara au Congo en 1965 à partir de son Journal du Congo, l’article propose une lecture décoloniale de la coopération entre Cuba et le Congo. Considérée comme un « échec » militaire, cette mission de soutien témoigne tout à la fois d’une alliance des pays du tiers-monde et d’une volonté anticoloniale et anti-impériale d’imaginer des possibles politiques alternatifs. Elle montre aussi les difficultés de faire front commun et d’implanter au Congo l’idéal marxiste cubain de « l’homme nouveau ». Malgré cette situation ambivalente, analysée à partir du journal du Che et de photographies, cette expérience militaire a été un premier jalon tiers-mondiste d’affirmation de « modernités multiples », qui ne sont pas assujetties aux seules modernités occidentales, comme en témoigne une description de l’exposition artistique du Sud Global de La Havane en 1989, conçue par l’auteure comme en étroite filiation avec le rêve du Che.

Congo and Cuba
For a Re-Existence of Latitudes
Revisiting Ernesto Che Guevara’s little-known 1965 trip to the Congo from his Congo Diary, the article offers a decolonial reading of cooperation between Cuba and the Congo. Considered a military “failure”, this mission of support testifies both to an alliance of Third World countries, and to an anti-colonial and anti-imperial will to imagine possible alternative policies. It shows also the difficulties of making a common front and implanting in the Congo the Cuban Marxist ideal of the “new man”. In spite of this ambivalent situation, analyzed from Che’s diary and photographs, this military experience was a first Third World milestone in the affirmation of “multiple modernities”, which would not be subjected only to Western modernities, as shown in a description of the artistic exhibition of the Global South in Havana in 1989, conceived by the author as being closely related to Che’s dream.

Covid 19
Oxymores des totems et des signes de vie à Kinshasa, par

Covid‑19
Oxymores des totems et des signes de vie à Kinshasa
L’auteur analyse les signes verbaux, non-verbaux, les rituels intégrés dans les discours dominants et dans les discours communs en réponse à la pandémie de Covid‑19 à Kinshasa, entre mars et mai 2020. « Masque », « geste barrière », « confinement » sont tour à tours lus à travers leurs résonnances en lingala ou au sein de l’histoire récente du Congo. L’auteur montre comment ils se chargent d’« oxymores », où des significations antithétiques viennent se greffer sur le discours officiel, venant le contredire ou en tout cas le biaiser. L’auteur revient également sur les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre l’épidémie, le confinement impossible de Kinshasa, la hausse des prix, les mises en scène médiatisées des hommes politiques et des hommes d’églises, les conséquences sociales dramatiques pour les plus pauvres. C’est finalement à un « éloge de la lenteur » que nous convie l’auteur, ainsi qu’à une politique du « care » et de l’accompagnement : dernière positivité paradoxale du virus.

Covid‑19
Oxymora of Totems and Signs of Life in Kinshasa
The author analyzes the verbal and non-verbal signs, as well as the rituals integrated into dominant and common discourses in response to the Covid‑19 pandemic in Kinshasa, between March and May 2020. “Mask”, “barrier-gesture”, “lockdown” are read in turn through their resonances in Lingala or within the recent history of Congo. The author shows their oxymoronic uses, where antithetical meanings are grafted onto the official discourse, contradicting or in any case twisting it. The author also discusses the measures taken by the government to fight the pandemic, the impossible lockdown of Kinshasa, the rise in prices, the high-profile media coverage of politicians and churchmen, and the dramatic social consequences for the poorest. Finally, the author invites us to a “praise of slowness” and to a “policy of care”: the last paradoxical positivity of the virus.